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30 minutes en studio avec Owlle

Owlle est la rousse incendiaire qui vient de sortir son premier album de dream pop il y a un mois. On a rencontré la chouette fille avant qu’elle ne prenne la route en tournée.

Vous avez fait les Beaux Arts. Pourquoi avoir finalement bifurqué dans la musique ?

Owlle : J’ai toujours aimé la musique. J’en écoutais beaucoup mais je ne la pratiquais pas. Plus jeune, je ne savais pas comment l’exprimer et les Beaux Arts se sont présentés comme un moyen d’essayer des choses. Là-bas, j’ai fait pas mal de vidéos et d’installations et, du coup, j’ai été amenée à travailler la dimension sonore. Et puis j’ai rencontré des gens qui m’ont amené à écouter de la musique un peu différente de celle que l’on entend à la radio ou chez ses parents. J’ai découvert le trip-hop et le travail de Brian Eno, son parcours en tant qu’artiste plasticien. Je me suis alors dit que je pouvais très bien moi aussi commencer à faire de la musique à 22 ans sans avoir fait ma première compo à 16.

Pourquoi La chouette comme nom de scène ?

C’est parti d’une anecdote : j’étais avec ma guitare chez moi à Paris et j’ai vu écrit le mot “Owl”. J’ai trouvé ça cool graphiquement mais je ne savais pas ce que ça voulait dire à l’époque. Puis, après en avoir découvert le sens, je me suis rendu compte de la dimension mystique que revêt cet animal et ça m’est paru évident que c’était cool au-delà de l’aspect visuel. Je me suis alors amusée à écrire de différente façon le mot pour finalement simplement le féminiser. Ça marchait, j’avais mon nom de scène !

Quand on vous questionne sur vos inspirations, vous citez Madonna, Brian Eno et Beth Gibbons (Portishead). C’est très 80’s tout ça et étonnant pour une fille qui a seulement 27 ans, non ?

Je ne suis pas obsédée spécialement par les 80’s mais c’est vrai que quand j’ai découvert Portishead, par exemple, j’ai tout de suite accroché sur la structure musicale, les sons utilisés, les voix, le côté atmosphérique de la musique… J’ai trouvé une manière de procéder en musique qui était proche de ce que je ressentais. Mais ça ne m’empêche pas d’écouter d’autres choses. Si demain tu me mets n’importe quelle chanson de Mariah Carey, je te la chante !

C’est entre autres Pierrick Devin (qui a, entre autre, fait un projet avec Alex Gopher) et Myd de Club Cheval qui ont produit votre premier album. Comment s’est passée respectivement la rencontre ?

J’ai commencé à travailler en studio avec Pierrick qui avait l’expérience de la prod. Il a vraiment, grâce à son expérience de la prod, cadré mon projet. Parallèlement, je suis devenue amie avec Myd des Club Cheval. Il m’avait déjà aidé à arranger des titres sur le premier EP et on avait très envie de continuer à des choses ensemble. Dès que je bloquais sur un titre, je lui demandais des conseils et il m’aidait en m’amenant vers des choses que je n’osais pas faire sans recul. Voilà.

C’est quoi la thématique principale de vos chansons ?

On retrouve très souvent dans ma musique l’idée de course vers l’avant, de recherche de quelque chose ou de quelqu’un. Ça revient souvent dans le lexique. Mes textes décrivent aussi plus des paysages que de gens. Ma musique est imagée. Le seul titre terre à terre serait peut être “Your Eyes” qui est vraiment pour le coup la balade ricaine par excellence.
À part, il y a aussi “Creed”, un titre que l’on a fait avec Quentin (ndlr, Myd). C’est le morceau sur lequel je me suis le plus amusée parce que j’y aborde un nouveau sujet, celui de la croyance en général. Ce track m’a d’ailleurs donné envie d’écrire plus de textes un peu osés.

Vous vous sentez proche de cette nouvelle scène composée de Grimes, Austra, London Grammar, Banks et co ?

Carrément ! Ces groupes me touchent bien que je connaisse moins London Grammar et comprenne moins l’engouement autour de Banks. J’ai lu pas mal de critiques comparant certains de mes titres avec ceux de Grimes et Austra. Ça me fait un peu rire parce que quand sont arrivés Grimes et Austra, moi ça faisait déjà un paquet de temps que j’avais produit mes chansons. Ça m’a rassuré dans la direction que je prenais.
Quoi qu’il en soit, je trouve vraiment qu’il y a un truc qui nous unit tous.

Et Yelle, elle vous parle ?

J’ai vachement écouté aussi ! C’est différent parce qu’elle chante en Français mais je trouve que niveau production sur Safari Disco c’était une bonne claque !

Vous écoutez quoi en ce moment ?

En ce moment je suis à fond sur ce que fais Cyril Hahn. Je l’ai découvert grâce à son remix de Beyoncé et je suis fan ! J’aimerais beaucoup travailler avec lui ! Sinon, je ne me passe pas non plus de Little Dragon

Votre nouvel album s’appelle France alors que vous chantez surtout en Anglais. Paradoxal, non ? À moins qu’il ne s’agisse d’un clin d’oeil à votre prénom ?

Quand l’album a été terminé s’est posée la question du titre. Je ne voulais pas prendre celui d’un morceau et inventer un titre en anglais me gênait parce que je ne comprenais pas ce processus de mettre des mots sans musique. Je trouvais aussi dommage de le nommer tout simplement “Owlle”. Je voulais quelque chose qui reste. Je me suis alors retrouvée à jouer au jeu de Brian Eno qui consiste à tirer une carte portant un conseil comme “Passe à la suite” ou “Continue tu es sur la bonne voie”. J’ai pour ma part sélectionné une carte sur laquelle était marqué : “Ça sera une chose qui résumera”. Un matin je parle à Myd de mon idée de France et il me dit : “T’es vraiment folle de pas appeler ton album comme ça. C’est ton prénom et il est super !” Au début j’avais peur que les gens perçoivent ça comme une démarche égocentrique et puis j’ai fini par me dire que c’était cool et un beau clin d’oeil au pays d’où je viens.

J’adorerais que Franck ocean produise mon deuxième album !

Un track préféré sur ce nouvel album, justement ?

“Fog”, le premier. Je l’ai écrit sur la thématique du film du même nom de Carpenter. C’est l’histoire d’une personne un peu extraterrestre, complètement paumée qui erre dans une forêt. C’est idiot mais ça me parle ! Au départ, ça devait juste être une intro de concert mais je me suis tellement amusée à la faire qu’elle est devenue une chanson.

Un remix pour Depeche Mode, un duo avec Boy George dans l’émission Taratata. Avec qui aimeriez-vous aussi travailler ?

Je ne sais pas trop. Je ne pensais pas du tout remixer Depeche Mode et je ne m’attendais pas non plus à faire ce duo avec Boy George. J’ai donc envie de dire : “Tout est possible !” Mais je lance un second appel à Frank Ocean qui est ma révélation de cette année. Ce qu’il fait est incroyable. Il peut ajouter des aboiements de chiens et ça marche, c’est fou ! Je rêverais qu’il produise mon deuxième album…

Quoi de prévu pour la suite ?

La tournée qui a débuté en janvier et notamment en Italie, en Allemagne et au Brésil, des pays qui me soutiennent depuis le premier EP. Je veux tout faire tout pour que j’aille de plus en plus jouer à l’étranger.

Vous habitez dans le 18ème il paraît ? Quelles sont vos bonnes adresses du coin pour aller boire un verre ou faire la fête ?

Pour être honnête, je sors surtout pour les concerts. Mais sinon j’aime beaucoup aller au “Café Lomi” et, le soir, “Chez Arsène” un petit bar et restaurant antillais rue Doudeauville pas loin de chez moi. C’est tenu par un retraité qui n’ouvre que le week-end. On y mange des spécialités antillaises et on y boit de super bons Ti’ Punch.

C’est quoi votre clique (on a cru entendre que vous trainiez un peu avec Les Twin Twin) ?

Oui, je connais bien Laurent Idir des Twin Twin. Le groupe m’a toujours soutenu dès le début de mon projet. Je les vois pas mal… Ma clique ce sont les gens avec qui je travaille : Myd, Lilly Wood and the Prick et en ce moment mes musiciens !

Pas trop compliqué d’avoir des cheveux roux ?

Au contraire, j’ai l’impression que c’est plus un atout. Depuis que je suis rousse, j’ai l’impression que les gens m’ont enfin remarqué et ai la sensation d’enfin exister. Je trouve que ça me ressemble, ça renvoie à des choses qui me parlent. D’ailleurs à ce propos, Laurent des Twin Twin m’a parlé d’une interview dans laquelle David Bowie explique que c’est le jour où il s’est teint les cheveux qu’il a eu du succès et s’est senti légitime. J’ai aussi connu ce déclic.