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Et si Micachu était devenue intéressante ?

En 2009 elle faisait paraitre “Jewellery” avec les Shapes, un bidule pop mal bidouillé. Cinq ans plus tard, elle réapparait mystérieusement avec la B.O d’Under The Skin et une nomination au BAFTA.

Avant de réaliser ses chefs d’oeuvres Birth ou Sexy Beast et bien entendu Under The Skin, Glazer réalisait des clips (Radiohead, Massive Attack, Jamiroquai). Coutumier à filmer la musique, il était évident que Glazer apporterait le plus grand soin à sa bande-son, acteur important et même grand rôle d’Under The Skin puisqu’elle campe une sorte d’incarnation sonore des actes du protagoniste, comme de son aura, de sa réflexion sur les hommes qu’elle croise. Dans sa quête sensorielle, l’oeuvre épate la rétine mais demeure tout autant un film à écouter. Curieux, on regarde la signature de l’OST, il s’agit d’une certaine Mica Levi.

Le temps de percuter, on se souvient que Mica Levi n’est autre que Micachu, projet de 2009 (paru chez Rough Trade) où la promesse de l’avant-garde en pop devenait simplement une folie fluo (pourtant produite par Matthew Herbert) bricolée laborieusement et vaguement foutraque. Pas loin de six ans de silence et Micachu revient transformée en elle-même, produisant désormais sous son nom, se baladant en jogging, l’air débonnaire (voire de s’en foutre) et réalisant via la B.O d‘Under The Skin, simplement un des monuments sonores de 2014. Une B.O brûlante, au feu lent, où se dilue la glande surrénale. Envoûtante et terrifiante, elle fascine par l’angoisse et la menace et se fait complice la peur au bide – en évitant les écueils du genre – de cette plantureuse créature séduisant des hommes pour les vider de leur essence vitale.

Entre Alexandre Desplats et Hans Zimmer

Levi n’a donc pas volé sa nomination au prestigieux BAFTA (British Academy of Film and Television Awards) dans la catégorie meilleure OST. En compétition avec Desplats pour The Grand Budapest Hotel ou Hans Zimmer pour Interstellar, coincée entre deux des plus grands soundtrackers des temps présents, Mica est en train de redessiner les hiérarchies en coudoyant les solfèges audacieux de notre ère. Une renaissance pour Levi qui s’effaçait dans l’anodin il y a cinq ans (hormis quelques prods dans l’ombre pour Kwes ou Dels) et réapparait aujourd’hui au sommet de sa superbe.

Grisé par les louanges, fin 2014, Mica Levi s’offre un second acte. Sur le label de Demdike Stare, (le leur, DDS, celui qui porte leur nom) faisant paraitre une cassette au moins aussi dense, sulfureuse, torve et hostile que l’OST d’Under the Skin. Elle s’appelle Feeling Romantic Feeling Tropical Feeling Ill, et elle déroule les mêmes songes suant d’anxiété dans les cordes à la Ligeti que le cauchemar d’Under The Skin. Une heure de collages éclatés, éclatants et de nappes en collision, pour cette trilogie en cassette qui impose Mica Levi d’un coup d’un seul en espoir d’une musique savante pour tous.