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L’interview “Paris” de Benjamin Clementine

Paris est une ville clef pour le story teller Britannique Benjamin Clementine. C’est la ville où il est sorti de la galère, la ville où sa carrière a débuté, la ville qui a finalement changé sa vie. Interview autour de la ville lumière avec un artiste hors normes.

Villa Schweppes : Pour toi, que représente Paris ?

Benjamin Clementine : Elle fait partie de ma vie, de mon coeur. C’est une jolie ville. Je choisirai Paris entre 1000 autres villes. Elle a un esprit qu’aucune autre ville n’a, selon moi. J’ai le sentiment d’avoir commencé ma vie ici. J’ai beaucoup de respect pour elle.

Comment t’inspire-t-elle ?

Benjamin Clementine : Les gens, l’architecture, la nourriture, les rues, le bruit, la pollution, l’attitude des gens : vieux, jeunes…

Mais tout ça, tu peux le retrouver à Londres (sa ville natale, ndlr), pourquoi est-ce si spécial à Paris ?

Benjamin Clementine : Je ne pense pas que tu retrouves tout ça, de la même façon, à Londres. C’est différent. J’ai le sentiment que l’architecture influence tes sentiments, de façon personnelle. Ici, les rues sont plus étroites. Tu ne peux pas rater les gens en marchant. Tu dois de temps en temps, même, faire face au fait que tu vas croiser des gens que tu ne veux pas forcément croiser. Tu n’as pas le choix. C’est plein de petites choses comme ça, que j’aime à Paris. Tu ne peux pas prétendre connaître Paris, la ville change tout le temps. L’été par exemple, ou fin décembre, la ville est vide, si tu ne prends pas compte des touristes. Je n’aime pas les gratte-ciels, donc Paris me plait. Et puis, à Londres, les gens sont parfois hypocrites, pas ici : si on ne t’aime pas, on ne t’aime pas. On ne fait pas semblant.

Quel est ton plus beau souvenir de scène à Paris ?

Benjamin Clementine : Sûrement au Carmen, à Pigalle. C’est très beau. Je n’aime pas vraiment les gens qui y vont, mais pour mon premier show, j’y étais et je n’oublierai jamais. Mais mon moment favori, c’était mon concert à la Cigale. Je n’avais pas encore sorti d’album, j’avais juste trois sons de sortis à l’époque. Ça m’a fait réaliser qu’en tant qu’artiste, tout est possible. J’ai réalisé ça grace à la France.

Ton moment de vie préféré ici ?

Benjamin Clementine : J’en ai eu beaucoup, et je mentirais si j’en choisissais un seul. Mais j’aime beaucoup me promener. C’est l’une des seules villes majeures où tu peux te promener à pied et tout voir. Je trouve ça stupide de circuler en voiture ici. J’ai beaucoup aimé l’hiver dernier par exemple, avec la neige etc. C’est très beau. J’adore le faire, même si je peux de moins en moins.

Tu as l’air d’être quelqu’un de très calme. Paris n’est pas trop bruyant pour toi ?

Benjamin Clementine : Si parfois. Mais j’aime ce paradoxe. C’est ça d’être dans une relation, il te faut quelqu’un de différent. On a des points communs, mais on a aussi des différences. J’ai d’ailleurs une anecdote : j’aime beaucoup courir, et je me suis rendu compte qu’ici, courir revenait à respirer la pollution… Je vais donc courir au Jardin du Luxembourg maintenant… Mais être calme à Paris, c’est possible, il te suffit de trouver l’endroit adéquat. Je passe par exemple beaucoup de temps à la maison, je ne sors pas trop. J’ai toujours été comme ça.

À Paris, on ne fait pas semblant : si on ne t’aime pas, on ne t’aime pas.

Et quand tu sors, avec tes amis, tu vas où ?

Benjamin Clementine : Je ne sors pas trop… Bien sûr, ça m’arrive, mais je ne fais pas tellement ça. Je suis un peu occupé par ma musique. J’ai même un ami qui est frustré à cause de ça : il a des clubs à Paris et il m’invite constamment, mais je ne sors pas. Sinon, il y a ce pilier, sous un pont, sur lequel j’aimais m’asseoir de temps en temps, et observer les gens, et penser…

Le Benjamin de Londres, c’est le même qu’à Paris ?

Benjamin Clementine : J’aime à penser que j’ai un peu changé. Je me sens trahi par Londres. Quand j’y retourne, je m’attends à être heureux, mais ce n’est pas le cas. Il y a beaucoup de choses que je n’aime pas ici, comme la pauvreté apparente des gens dans la rue, ça me rend triste. Les deux villes sont très différentes. Mais il y a énormément de Français à Londres… (rires, ndlr)

Et le futur de ta carrière, tu le vois où ?

Benjamin Clementine : En tant qu’être humain, ma carrière je la vois dans le monde entier. J’aime voyager et partager ma musique avec des gens différents, partout dans le monde. Mais bon, à chaque fois que je reviens à Paris, je sais pourquoi j’ai choisi cette ville. Sans pouvoir forcément vous donner de raisons particulières…

Quel genre de musique représent Paris d’après toi ? Une chanson, un chanteur ?

Benjamin Clementine : J’aime la chanson française, pas ces trucs pourris électroniques etc. je ne suis pas particulièrement conservateur, mais j’aime beaucoup la vraie musique : Henri Salvador, Léo Ferré. Par exemple, je ne comprends pas trop Christine and The Queens, mais elle fait ce qu’elle sait faire. J’aime beaucoup Stromae par contre, même s’il est belge et non français, je le trouve très authentique. Sinon, Benjamin Biolay, Vanessa Paradis, et puis le reste des classiques de la chanson française. Les vrais représentants de musique en France, ce sont eux, selon moi. C’est comme Paul Mc Cartney, selon moi, il est plus légitime que Sam Smith, pour représenter la musique anglaise. Les gens pensent qu’on doit être ouverts, mais pas à la musique de merde. Pour moi, Paris, c’est la musique classique et la chanson française.

Être calme à Paris, c’est possible, il te suffit de trouver l’endroit adéquat.

D’accord. Et les chansons que tu as ajoutée à cette réédition qui est sortie récemment, qu’apportent-elles à ton album ?

Benjamin Clementine : Elles viennent le compléter. L’album original était un peu éparpillé. Si tu reprends mes deux premiers EP, il y a une histoire et une continuité. Chaque titre était censé venir compléter le précédent, dans une continuité, comme une vraie histoire. Ces cinq chansons devaient être dans l’album, et pas placée à la fin. J’ai du faire des compromis pour cet album, et ça en faisait partie. Tu dois trouver des chansons dont les gens se souviendront plus facilement et les mettre avant le reste.

Et le futur, à quoi ressemble-t-il ?

Benjamin Clementine : J’ai commencé à tourner, en fait, j’y ai passé le plus clair de l’année. J’espère pouvoir parcourir le monde pour donner ma musique aux gens. Certains ont besoin de me voir en personne pour être convaincus par ce que je fais. C’est comme ça aujourd’hui, et c’est l’état de la musique actuelle. On n’est plus dans les années 50. Tout est inversé, en fait. Je vais donc tourner un peu, et puis me mettre sur mon second album, c’est un projet qui m’excite beaucoup. Cet album-ci m’a ouvert des portes, à moi d’être honnête avec moi même et de prendre les décisions les plus sages. Cet album sera inspiré par ma vie ici, mais aussi par les événements récents (Charlie Hebdo, Baltimore etc…). On verra.

Propos recueillis par Tawfik Akachar et Léopold Lemarchand.

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