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L’interview-fleuve de Black Strobe (partie 2) : la techno, le GRM et l’évolution de la musique

Seconde partie de notre interview de Black Strobe et Rebotini. Après le blues, c’est à la musique électronique de passer à la moulinette !

Retrouvez le portrait d’Arnaud Rebotini et la première partie de cette longue interview.

Les écueils des musiques électroniques

Arnaud, vous avez collaboré avec Christian Zanesi, la musique vraiment expérimentale du Groupe de Recherche Musicale est quelque chose qui vous attire ?

Arnaud Rebotini : Oui, puisque j’ai collaboré avec eux et signé des pièces pour le GRM. Après, j’ai mes périodes sur la musique dite “savante”. Ma collaboration avec Christian était vraiment passionnante, parce que je suis plus dans un truc répétitif et électronique…

Museum : tu fais vraiment de la pop à côté de ce mec…

Arnaud Rebotini : …oui, voilà. C’est un grand compositeur que j’aime énormément, qui a connu Pierre Schaeffer etc… C’est vraiment un pionnier. Je peux être très expérimental, mais je m’en écarte aussi car j’aime aussi la relation avec les gens. Dans la musique expé, au bout d’un moment, tu te retrouve avec toujours la même secte, les 30, 40, 200 personnes qui vont voir ces choses là. En tant qu’artiste, je peux m’y intéresser, mais je me méfie aussi de cet idée d’enfermement.

Vous dites souvent avoir le même genre de rapport ambivalent avec la techno…

Arnaud Rebotini: Fondamentalement, j’adore la techno, pour moi c’est la dernière grosse révolution musicale. J’adore cette musique, elle a une force incroyable. Sauf qu’au bout d’un moment, le public peut prendre un aspect “troupeau” prêt à ingérer n’importe quoi. C’est moins intéressant que d’avoir une audience attentive et investie, comme par exemple à la Gaîté Lyrique, avec les synthés : tu sens que le public est là pour ta musique. Il y a toujours un côté entertainement, même dans le rock, mais c’est le côté fête foraine que peuvent prendre parfois certaines soirées qui m’énerve.

On trouve dans votre B.O. pour Eastern Boys des évocations de Phillip Glass ou Steve Reich

Arnaud Rebotini : Si tu connais un peu Zend Avesta, c’était déjà présent. Le réalisateur du film est venu me voir en me parlant de Zend Avesta et de certains morceaux de l’album. Il y a évidemment quelque chose de proche de la musique atonale, dissonante, très Debussy, Ravel, Webber, ce genre de compositeurs du début du siècle dernier que j’aime. Il y a effectivement les boucles et les mouvements répétitifs de Glass ou Reich que j’adore. C’est une facette que j’avais laissé de côté depuis quelques années, ça m’a donc bien fait plaisir de la retravailler pour cette B.O.

L’évolution de la musique

Vous avez récemment sorti une mixtape de blues. Aujourd’hui, y a-t-il encore selon vous des groupes excitant dans ce registre ?

Arnaud Rebotini : J’avais adoré le premier album de Willis Earl Beal, le second est moins bien. Il la joue plus r’n’b, je trouve ça moins réussi. Le premier, je l’avais trouvé hallucinant. Après, je suis trouve assez fan de choses comme Jon Spencer Blues Explosion. Il y a aussi quelques autres trucs, mais c’est toujours très revivaliste, sur des labels comme Norton Records, Seasick Steve…

Tant qu’il n’y aura pas une nouvelle technologie, je ne vois pas ce qu’il peut se passer d’autre que de la techno.

Vous y trouvez des points communs avec la techno ?

Arnaud Rebotini : Déjà des points commun géographique : Chicago ou Detroit sont des lieux clés pour le blues et pour la techno. C’est dû aux migrations des noirs du sud. C’est une musique sur la répétition, qui a été crée par des machines. Parce que le blues, le boogie, la country ne seraient rien sans le bruit du train, la rythmique du pas des chevaux. C’est tout ce truc des work songs etc…

Les conditions techniques conditionnent donc la création…

Les évolutions de la musique, de là, sont en partie liées à la technologie. Le blues utilise beaucoup la guitare acoustique car elle est plus simple à utiliser que le violon ou le banjo, et l’harmonica, car c’est moins cher et plus transportable qu’un saxophone. On a créé le blues avec ça parce que les mecs n’avaient pas d’argent et que c’était plus facile. Pareil pour ceux qui ont crée la techno: les TB303, qui faisaient le son acid house, ça a été un échec commercial. Aujourd’hui, ça vaut une fortune. J’imagine aussi que la guitare Stella à 1 dollar qu’avait Muddy Waters doit aujourd’hui valoir chère.

Et depuis la techno, que s’est-il passé ?

L’histoire s’est peut être nettement ralentie aujourd’hui. Je pense souvent à “Beyond the Wheel”, de Depeche Mode. Trente ans avant, on écrivait “Blue Suede Shoes”. Maintenant, trente ans après, tout le monde trouve toujours “Beyond the Wheel” aussi parfait, tout le monde rêverait d’avoir le même son. Alors qu’en 85, personne ne voulait faire “Blue Suede Shoes”. Des 50’s aux 80’s, il y a eu un parcours incroyable qui est beaucoup plus lent maintenant.

Suivez vous la scène musicale synthétique qui a explosé suite aux succès des premiers albums solos d’Arnaud, Sommet, Egyptology, Volcan etc… ?

Arnaud Rebotini : Sommet et Egyptology sont liés à Jérôme de Desire Records. Je connais un peu les mecs de Sommet par Turzi et Code Napoléon. Je suis très fan de ces gens là. Tout ce que peut sortir Jérôme est hyper excitant. Je fais par contre attention à tous ces mecs trop revivalistes, qui se lancent dans des trucs synth wave, du Kas Product sans le chant qui défonce… J’adore aussi Frustration et les disques de chez Born Bad.

Vous posez-vous des questions sur le futur de la création musicale?

Arnaud Rebotini : On n’a plus l’âge, je pense. Le futur, c’est pour les gamins de 20 ans. Si ce sont des mecs de 40 ans qui inventent le futur, c’est qu’il y a un problème. Le futur et tout ce fantasme… Il faudrait qu’il y ait un Miles Davis dans le coin. Je suis assez pessimiste sur le futur : tant qu’il n’y a pas une nouvelle technologie, que je ne vois pas arriver, je ne vois pas bien ce qu’il peut se passer d’autre que de la techno.

La reprise de Johnny Cash, premier extrait de Godforsaken Roads, tout juste publiée:

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