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L’enquête du mois : les NFT vont-ils bouleverser l’industrie musicale ?

Depuis quelques mois, nous assistons à une véritable frénésie pour les NFT dans le monde de la musique. Il faut dire que cette technologie révolutionnaire, qui introduit pour la première fois le concept d’unicité pour des biens numériques échangés sur Internet, offre une infinité de nouvelles possibilités aux artistes… au point de chambouler l’industrie musicale. Décryptage.

Quel est le point commun entre Agoria, Kings of Leon, Steve Aoki, Jacques, Aphex Twin, Deadmau5, Mr Oizo, Boys Noize ou Grimes ? Tous ces poids lourds de la musique se sont lancés cette année dans l’aventure NFT… et ils sont loin d’être les seuls ! Si beaucoup d’artistes cherchent avant tout à s’approprier cette tendance pour faire le buzz et récolter facilement beaucoup d’argent, cette technologie balbutiante recèle un potentiel énorme. Tellement énorme qu’on est bien incapable aujourd’hui d’en prédire tous les usages futurs. Mais une chose est sûre : les NFT s’apprêtent à bouleverser l’industrie musicale.

Avant d’aller plus loin, rappelons ce qu’est un NFT. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un jeton non fongible (“Non Fungible Token” en anglais). Cela signifie que contrairement aux crypto-monnaies classiques comme le Bitcoin, où chaque unité a la même valeur, la même utilité, et est donc interchangeable, il s’agit de jetons cryptographiques uniques, dotés de caractéristiques propres et infalsifiables car enregistrées sur une blockchain. C’est cette unicité qui fait qu’un NFT constitue un titre de propriété numérique incontestable sur un bien immatériel. Un NFT peut ensuite être rattaché à une oeuvre d’art digitale, un morceau de musique, un ticket de concert, des bonus spéciaux à l’achat d’un album… ou tout ça à la fois.

Une aubaine financière inespérée

Si les NFT connaissent un tel succès, c’est notamment en raison des limites actuelles de l’industrie musicale, mises en lumière par la pandémie de Covid-19. Avec l’arrêt des concerts, nombreux sont les acteurs de la musique à avoir perdu leur principale source de revenus. En effet, malgré le succès des plateformes comme Spotify ou Apple Music, 90% des artistes reçoivent moins de 1 000 euros par mois du streaming. Ils ont donc dû trouver de nouveaux moyens de gagner de l’argent pour continuer à produire leur musique, à vivre de leur art.

“Pour les artistes présents sur notre plateforme, les NFT sont en train de devenir la source de revenus principale”, explique Kevin Primicerio, cofondateur de Pianity, la première marketplace française de NFT spécialisée dans la musique. “Je prends pour exemple Sarkis Ricci, un pianiste basé à Berlin qui n’avait plus d’argent à cause de la pandémie. Il s’apprêtait à retourner vivre chez ses parents, mais il a vendu coup sur coup deux morceaux en NFT sur Pianity, pour une valeur totale de 9 000 euros. Il est super content, parce que ça lui permet de continuer à vivre de sa musique tout en restant à Berlin, au contact d’artistes qui le stimulent.”

Interface de Pianity

Interface de Pianity

Les superstars de la musique surfent actuellement sur la vague des NFT pour engranger des millions de dollars, à coups de collaborations avec des artistes digitaux de renom ou de ventes en édition limitée de “goodies” numériques certifiés par la blockchain. Elles profitent de cette aubaine après des mois marqués par l’arrêt des tournées et les reports d’albums. Mais finalement, cette révolution pourrait surtout bouleverser la vie des artistes indépendants, plus intimistes mais suivis par des communautés de fans dévouées.

Les NFT redonnent le pouvoir aux artistes et aux fans

Au-delà de la manne financière inespérée en ces temps difficiles, les NFT présentent bien d’autres intérêts pour l’industrie musicale. Etienne Piketty, cofondateur du label Pain Surprises, l’a bien compris. C’est pourquoi il s’est appuyé sur cette technologie pour proposer une expérience inédite aux fans de Jacques à l’occasion de la première sortie de son tout nouveau label, Recherche & Développement. Avec la bénédiction de l’artiste, toujours prêt à expérimenter, ils ont décidé de vendre en NFT les secondes de droits master (0,51% des droits phonographiques) de son nouveau morceau “Vous”. Jacques et le label ont gardé une seconde chacun, et les 192 restantes ont été écoulées en 36 heures. Et ce n’est pas tout ! Chaque NFT contenait aussi un exemplaire du contrat manuscrit signé par Jacques, une vidéo exclusive réalisée par l’artiste, les stems et le master de la seconde achetée… tout en offrant la possibilité d’écouter les secondes débloquées en exclusivité avant la date de sortie de “Vous”, prévue le 3 juin 2021. La cerise sur le gâteau ? Les acquéreurs ont également reçu à la maison un vinyle numéroté, signé et tokenisé.

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“Le fait que c’était la première sortie de mon label, que ce soit un morceau de Jacques, que ce morceau s’appelle “Vous” et que le refrain soit “Je suis fier de faire partie de vous”, ça faisait que l’alignement des planètes était parfait. Et puis c’était dans un moment où les NFT avaient de la visibilité et commençaient à intéresser le public, les médias, et proposaient une alternative au business classique de la musique”, raconte Etienne Piketty. “J’étais super content que la première prise de parole de mon label soit une expérience, qui en plus permettait de donner de la visibilité au morceau et au label. Aujourd’hui, je trouve assez drôle de me dire que ce morceau ne m’appartient plus. C’est un joli pied de nez.

https://youtu.be/RFsn7PNRmjk

En supprimant presque tous les intermédiaires avec leur public, les NFT offrent de nouvelles possibilités créatives aux musiciens, qui peuvent s’essayer à toutes sortes de créations digitales. Ils peuvent également proposer des expériences bien plus enrichissantes à leurs fans. C’est ce qu’a fait Jacques en mettant aux enchères un NFT unique pour la sortie de “Vous”, qui contenait en bonus deux tickets à vie pour tous ses concerts (hors festival). Mais de manière plus classique, on pourrait imaginer un NFT permettant d’intégrer une sorte de fan club très fermé d’un artiste, donnant accès à des performances privées, à des questions-réponses en ligne, ou encore à des éditions collector d’un album. Même les labels pourraient en profiter, en vendant des albums, des singles, des visuels ou des clips sous la forme de NFT, au même titre que les festivals, les clubs et les salles de concert qui pourraient vendre leur merchandising et leurs places sous forme digitale.

Des obstacles à l’adoption loin d’être insurmontables

Vu comme ça, les NFT apparaissent comme une solution miracle dans une industrie qui souffre depuis la crise du disque. Mais il reste quand même quelques freins à l’adoption des NFT, à commencer par la barrière technologique. Tout le monde n’est pas expert en cryptomonnaies… loin de là. Mais comme le souligne Hasheur, la star des influenceurs crypto français, l’adoption croît de manière exponentielle : “C’est la seule courbe qui ne redescend jamais dans le monde des cryptos“, s’amuse-t-il. “Une personne sur deux qui s’intéresse à la blockchain et aux cryptomonnaies s’y intéresse depuis moins d’un an.” Pour lui, l’un des principaux obstacles à la démocratisation des NFT réside dans le manque de réglementation, arguant qu’un cadre légal clair pourrait attirer de gros fonds d’investissement sur le marché. Mais surtout, il pointe l’immaturité de cette technologie : “Il faut que les artistes testent les possibilités et les limites des NFT, quitte à avoir de mauvaises idées, à subir des échecs. C’est comme ça qu’ils vont comprendre comment exploiter au mieux cette technologie incroyable, et proposer des expériences totalement nouvelles et excitantes à leurs fans.”

Tweet de Hasheur sur les NFT - À retrouver ici sur Twitter .

Tweet de Hasheur sur les NFT – À retrouver ici sur Twitter .

Parmi les points noirs du boom des NFT, certains pointent également leur impact écologique. Un argument balayé par Hasheur, qui s’énerve du manque de compréhension du secteur. “Actuellement, la plupart des blockchains sur lesquelles sont émises des NFT consomment 1 000 à 100 000 fois moins d’énergie que le Bitcoin, qui lui-même n’est pas plus énergivore que les autres technologies de transactions comme les mails, le système financier ou les réseaux traditionnels de paiement”, pointe-t-il. “La blockchain et les NFT ne sont pas des aberrations écologiques. Et même si c’était le cas, on pourrait rétorquer que la technologie vient d’être inventée, qu’elle va s’améliorer au fil du temps.” C’est tout ce qu’on demande, car les NFT ont le potentiel de rendre l’industrie musicale plus excitante que jamais pour tous ses acteurs, à commencer par les fans.

Retrouvez notre interview avec Hasheur, l’influenceur crypto star ici !

https://youtu.be/pEreoxCwC6c