Petite semaine, mais belles trouvailles: Veronique Vincent et Aksak Maboul, Sunset, Mondkopf nouvelle formule, Royksopp, Vladislav Delay et Jean Nipon.
Extreme Precautions réinvente la Guerre Froide
Qu’est ce qui agite la superette ? Mondkopf s’habille avec des t-shirts à la gloire du sludge, du black metal et du grindcore. Avec Extreme Precautions, le producteur de techno fait de ses t-shirts une réalité et traverse la frontière.
On s’en relève la nuit ? Ça nous hante. Depuis son passage chez Perc Trax, Paul Regimbeau cherche à bousculer par sa plastique. Il était fan de grind (ou de ce que la machine à étiqueter verra comme musiques extrêmes) produisant de la techno, il est devient ici fan de techno pratiquant le grind. En somme, Mondkopf utilise les moyens de la techno pour produire du grindcore. En résulte moins d’une demi-heure où Regimbeau monte au front armé d’une double pédale sur un album qui s’évalue au nombre de balles tirées par minutes, filant comme un coup de feu et laissant derrière lui des impacts de chevrotine. C’est ce que l’électronique des zones tempérées a porté de plus sauvage et brutal cette année et ça installe un peu plus le producteur en sculpteur d’une techno à venir. Une nouvelle grande sortie In Paradisum.
Jean Nipon régale le club
Qu’est ce qui agite la superette ? Pour cette 16ème sortie du label ClekClekBoom, Jean Nipon réuni toute ses bonnes idées dans un EP calibré pour le dancefloor.
On s’en relève la nuit ? Surtout la nuit même. L’élève de l’école parisienne ClekClekBoom a bien retenu les bonnes leçons et propose un extented play percussif aux synthés chimériques. Les éléments sont excessivement travaillés, les effets sont porteurs et les structures intelligentes. Si avec ce 4 titres le parisien signait pour faire monter en ébullition le club, on peut dire qu’il a pleinement rempli le contrat. L’électronique traditionelle parisienne a assurément de belles journées devant elle.
Vladislav Delay, la rancoeur à l’ouvrage
Qu’est ce qui agite la superette ? Le Caravage finlandais de l’ambient a connu des soucis de visas et utilise “le sentiment de rejet” comme matière de son douzième album.
On s’en relève la nuit ? Oui. Ou alors on s’en sert de matelas pour tomber de sommeil. Sasu Ripatti revient à l’ambient après une décennie à tailler sa matière muni d’un beat (et des boulots avec Moritz Von Oswald ou en quartet). “Se sentir rejeté sans raison est un sentiment désagréable et incompréhensible” explique-t-il à Resident Advisor. Alors, Ripatti utilise le mystère et la gêne de la situation pour en sculpter une belle pièce d’ambient poussiéreuse et rugueuse, “designée pour être écouté à haut volume” (selon ses dires). Sur ce douzième LP (en tant que Delay), le finlandais donne des soubresauts de poisons hors de l’eau à un genre qui peut aisément s’enraidir et joue avec la lumière pour dessiner ses espaces. Une merveille d’amertume et colère froide en ambient.
Sunset, le soleil se couche tôt l’hiver
Pourquoi la supérette s’agite ? Mêlant électro-pop et spoken word, Sunset, ce duo entre Danger et Raphaël Siboni, livre un quatre titres en forme de série TV, sorti au rythme d’un épisode par semaine. La foule plonge avec appétit dans ce véritable concept-EP.
On s’en relève la nuit ? Il est un peu dur de rentrer dans ce genre de disque, entre apocalypse du quotidien, boule de nerf et électro sur-compressée. Après plusieurs écoutes, on se rend compte que le disque tient debout, mais manque de radicalisme. Un album sorti en toute confidentialité en 2010 vient illustrer cette idée. En effet, Diagone, de No, mêlait ce même regard avec des instrumentations progressives dingues munies de clavecins, vieux synthétiseurs et toute une palette d’effets improbables. Inécoutable pour la masse, ce Diagone est une pièce mythique pour un petit cercle de fanatiques. Sunset sont-ils assez forts pour susciter la même fascination ? Le temps nous le dira.
“Ex-Futur Album”, en provenance directe des 80’s (?)
Pourquoi la superette s’agite ? Ce disque aurait été entamé dans les années 80, aurait du sortir en 83 pour finalement arriver sur Crammed Records aujourd’hui. Vraie histoire ? Coup marketing de génie ? Quoi qu’il en soit, ce disque de Veronique Vincent et Aksak Maboul a d’ores et déjà capté votre attention.
On s’en relève la nuit ? C’est l’insomnie : boîtes à rythmes vintage, synthétiseurs rêveurs, textes hallucino-naïfs typés, le cocktail formé par cet album vaut toutes les boissons énergétiques du monde. Ce disque est celui que Jacno n’a jamais eu la patience de réaliser avec Ellie : tous les gimmicks sont là, nettement augmentés d’inspirations psychédéliques, disco, extra-occidentales. Cet Ex-Futur Album rappelle aussi le Atom Cristal & Satellite ressorti chez Serendip. Chaque morceau fait battre le coeur comme rarement. C’est peut-être vieux, mais c’est très nouveau, très libre. C’est notre passion de la semaine.
Bonus : sort aujourd’hui le Royksopp nouveau : The Inevitable End. Le duo norvégien a toujours des choses à dire mais ne souhaite plus le raconter au format LP. Avant de raccrocher les 33 tours – pour se consacrer aux EPs, maxis, singles et de la viande à charts – ils offrent à la postérité un cinquième album très (trop ?) long mais taillé d’un même marbre synth-pop discozoïde.