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On a écouté “Reflektor”, le nouvel album d’Arcade Fire!

On est allé au Jackets écouter le nouvel album d’Arcade Fire en avant-première. Un gros album en deux CDs, riche mais parfois inégal et très nettement scindé en deux parties. Débrief !

Passons sur “Reflektor”, que vous connaissez, et “We Exist”, parce qu’on n’a pu l’écouter qu’à moitié. Entrons dans le vif du sujet. On procédera morceau par morceau, tout cela sera un peu subjectif, mais vous vivrez ce moment intense comme si vous aviez été à nos côtés. Immersion.

Nous commencerons donc proprement avec le troisième morceau, “Flashbulb Eyes”. De prime abord, le groupe y développe une ligne de basse tendue, sur laquelle vient s’installer un groove de batterie surprenant : le groupe est plutôt connu pour fonctionner sur des constructions rock. On aurait presque tendance à se déhancher. Malgré tout, rien de révolutionnaire, on reste sur du Arcade Fire assez classique.

“Here Comes the Night Time”, qui suivra, va être bien plus réjouissante. Nourrie aux élans de Suicide, les mélodies se gonflent de delays et le chanteur Win Butler s’offre des cris dignes de ceux d’Alan Vega. La batterie s’offre une rythmique sous influence caribéenne, ce qui semble devenir l’un des nouveaux standards de ce genre de psychédélisme: ce qu’on entend ici semble être la réponse canadienne à l’excellente “Princesse au Petit Pois” des Français Mustang. On se dit à cet instant que le groupe s’est nourrit de nouveaux horizons, ce qui ne sera pas pour déplaire à ceux qui les auraient trouvé jusqu’ici un peu répétitifs.

“Normal Person” va par contre nous laisser de marbre. En effet, il y a dans ce morceau un aspect rock décervelé et adolescent façon Green Day qui fera office de répulsif parfait. Mention spéciale à la batterie lourdingue. On s’offre un verre, et on revient pour You Already Know”. Après une surprenante intro quasi Culture Club, et donc fondamentalement intriguante, voici le grand retour du style Butler tel qu’on le connait, grandiloquent, premier degré, et malheureusement assez clivant. Les aficionados devraient s’y retrouver, les autres pourront passer au morceau suivant sans remords.

Le premier CD se termine par un Joan of Arc”, qui, sous un basse-batterie tendu cache des accès de pop sucrée. D’ailleurs, le morceau s’offrira un petit passage en français. Il y a définitivement un lien étonnant entre la langue de Molière et la musique mignonne, un style French Pop. On prend une petite pause à cet instant, pour remettre nos idées en place. Cette Face A va finalement principalement réjouir les fans historiques du groupe, les audacieux se contenteront sûrement de la quatrième chanson récupérée sur iTunes. On nous annonce une face B bien différente, plus “calme”. On s’installe, prêts à réattaquer.

Pour ouvrir cette seconde partie, une seconde version de “Here Comes The Night Time” offre un mélange improbable et passionnant de cordes et de synthétiseurs, pour un résultat planant qui crée ainsi des espoirs de géant. “Awful Sound (Oh Eurydice)” et “It’s Never Over (Hey Orpheus)” semblent mettre en musique ce mythe antique, oscillant entre percussions habitées sur ballade américaine et disco soulful offrant des montées vocales proto-funk et “butlerement” dancefloor. On est d’ores et déjà conquis par ce deuxième disque bien plus audacieux, synthétique et explorateur.

Viendra ensuite l’explosion incontournable de “Reflektor” : “Porno”. Ce masterpiece est fondé sur le duo gagnant synthétiseurs – boîtes à rythmes, avec une incroyable bassline aride et tendue qui ferait presque écho au travail de Joakim. Tout cela sonne très 80’s, et malgré le lyrisme dissonant de Butler, on est là sur le vrai single de cet album.

On passera sur “Afterlife”, qui ne nous a pas vraiment conquis, pour passer directement au dernier morceau, “Supersymmetry” qui oscillera pendant deux ou trois minutes entre sons explorateurs et style Arcade Fire. Les beats à mi-chemin entre djembés et machines vintages seront des plus convaincants. Là, on nous annonce une track cachée, “bruitiste et expérimentale, donc [nous pouvons] remettre [nos] manteaux et commencer à y aller“. Pas de bol, cette pièce d’une dizaine de minutes semble être l’une des créations les plus fascinantes de l’histoire du groupe, version moderne de “Kontakte” du compositeur contemporain Stockhausen, ou réponse aux travaux de Panabrite aux US.

Là, puisque nos confrères n’ont pas semblé goûter au génie de cette composition folle et qu’on restait seul sur les canapés du Jackets, les organisateurs ont commis l’irréparable en coupant le morceau avant qu’il ne se termine. Dommage, vraiment, parce que cela laisse une sacrée insatisfaction dans nos coeurs avides d’explorations.

Mais on peut le dire, le CD 2 est largement plus audacieux que le premier. Il développe un langage tout à fait nouveau pour le groupe, réjouissant et moderne, adapté à la nouvelle décennie et prêt à mettre tout le monde (rockeurs, clubbers soft ou intello-bizarres) d’accord. On vous conseille de vous précipiter dessus dès qu’il sortira, pour pouvoir écouter le dytique mythologique, Porno et cette bonus track qui en valent, à première vue, largement la peine.

Rendez-vous le 28 octobre !