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L’hallucinante performance nocturne de Crisis

On vous avait déjà parlé des performeurs noctambules que sont les membres du collectif Crisis. Le 27 février, ils lançaient une mystérieuse invitation à laquelle, naturellement, nous avons répondu présents.

Tout commence sur un brumeux événement Facebook : on nous annonce une performance gratuite, accessible par groupe de six personnes par créneaux d’une demi-heure sur réservation. Une adresse est donnée, qui ne correspond à aucun lieu connu de nos radars, ainsi que le nom de la performance, “Jardin Crisis” et un “flyer” tiré du “Jardin des Délices” du peintre Jérôme Bosch. Aucune autre information n’a filtré, pour le meilleur et pour le pire. Car la sulfureuse réputation de Crisis, aussi bien présent au que lors des pose mille questions dans les esprits.

Ces jeunes gens sont connus pour métamorphoser les soirées qu’ils investissent à travers performances, costumes, scénographie, tout ceci de manière plus ou moins osée. On les avait déjà salués dans nos Newcomers de Janvier. Là, ils offrent l’une de leurs premières créations autonomes.

Mystère, Appréhension et Excitation

Les participants, que nous rejoignons à l’extérieur d’un bâtiment type résidentiel qui sert visiblement d’atelier au collectif, se savent un peu pionniers. Ils n’ont aucune idée du ton de l’expérience : ils sont tous un peu anxieux, se demandent s’ils seront mis dans des situations inconfortables, gênantes… L’ambiance est à la fois à l’appréhension et à l’excitation.

La porte s’ouvre. Nous sommes invités par le portier à rentrer et un hôte, vêtu d’une imposante robe type avocat nous installe dans une salle d’attente. Nous rencontrons, déjà, une étonnante secrétaire 60’s affairée sur sa machine à écrire. Il y aura plusieurs tentatives de lancer des conversations, mais un certain stress semble dominer : que va t’il donc nous arriver ? On nous sert du champagne, l’ambiance se détend.

Nous sommes appelés un à un, par intervalles d’environ 5 minutes. Les premiers à passer ont l’angoisse d’être seuls face à la découverte, les seconds se rongent les ongles en se demandant ce que que vivent ceux qui sont déjà partis. La salle d’attente fait déjà partie de l’expérience. Tour à tour, les membres du groupe descendent un escalier, passent une porte… et découvrent l’incroyable installation de Crisis.

Golfer avec des oeufs, émincer du Pop Corn

La pièce dans laquelle nous entrons à été grimée en jardin bourgeois, d’inspiration potentiellement coloniale, avec une pelouse synthétique, une chaise longue ou encore quelques clubs de golfs. Des personnages aux costumes sublimes vivent tranquillement leur étonnante garden party, sans se préoccuper spécialement d’avoir été rejoints par les spectateurs. A tout ceci s’ajoutent des éléments pour le moins surréalistes : des oeufs durs remplacent les balles de golfs, un homme émince du pop corn, un cuisinier “arrose” de jus de fruit un rôti qui n’était autre qu’une jeune femme. Des oiseaux humains perchés en hauteur jetaient parfois au sol quelques oeufs durs. Au fond du jardin, un homme perdait dans une partie de strip poker, heureusement relativement pudique, contre lui même. Outre quelques rires stridents ou chuchotements presque inquiétants, les performeurs ne font aucun bruit. Mais, plus que l’activité des différents personnages, c’est celle du spectateur qui est l’attraction.

Qu’allons nous y faire, que va-t’on nous demander ?” Les membres de notre groupe nous rejoignent petit à petit. Au bout de quelques minutes, on se rend compte que nous sommes libres de faire ce qu’on veut au sein de cet exotique tableau. D’abord par mimétisme, nous jouerons timidement quelques oeufs au golfs, avant d’aller regarder le joueur de poker, ou s’allonger dans le transat. Tout ceci est très retenu : “que sommes nous sensés faire ? Où sommes nous ?“. Les questions mettront une bonne vingtaine de minutes à s’effacer au profit d’un certain pragmatisme : nous aussi sommes convives de cette session de jardin complètement hallucinée, et nous n’avons donc qu’à nous adonner aussi à tous ces types d’activités incongrues que personne n’aurait jamais eu l’idée de pratiquer.

Le ticket jaune?

Une session de golf alimentaire plus engagée, préparation de la jeune femme farcie ou découpage sans but de pomme de terre en frites : tout ceci n’a pas de sens, mais nous commençons à nous y faire. Quitte à ce que tout ceci soit absurde, soyons le aussi, laissons nous aller à faire ce que nous voulons. Nous sommes de plus en plus à l’aise. C’est exactement à cet instant que les personnages s’approchent de nous, l’air très inquiets. Ils nous adressent enfin quelques mots : “Qu’est-ce que vous faites là ? Avez vous le ticket jaune ?“. A notre grand malheur, nous ne l’avons pas et sommes reconduits à la sortie. C’est alors que nous réalisons que nous aurions finalement pu, et même voulu, passer toute notre soirée dans cet étonnant jardin.

En une demie heure, nous avons à peine réussi à quitter ce que quelques idéalistes appelleraient “les carcans du réel”, ou quelque chose comme ça. Nous prenions à peine goût à ces activités surréalistes. A quelques minutes près, nous aurions sûrement fini par jongler au milieu de ce petit parc, déguster nos frites ou nous installer plus confortablement en redemandant du champagne. Notre groupe était plutôt réservé. On est curieux de savoir là manière dont aurait réagi des gens plus familiers du medium ou du collectifs, plus habitués à l’abstraction.

Notre seule certitude, c’est que ce moment finalement très doux était précieux, rare, et qu’avoir fait parti des rares initiés à y participer a été une chance. Nous vous conseillons de suivre le collectif sur le réseau, histoire de pouvoir réserver tôt votre place lors de la prochaine édition. Qui, annoncée sous le nom de “Cabaret Météorite”, promet aussi son lot d’hallucinations.

Les Plus de l’événement : la mise en scène, les costumes, l’immersion etc…

Les Moins : notre malheureuse timidité, qui a finalement gâché un peu l’expérience.

La Rencontre : Véronique, secrétaire charismatique.

La Phrase : ” Tu… tu veux un oeuf ? “

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