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La “Deep Pop”, une réponse européenne à l’EDM?

Alors que le mouvement est de plus en plus émergé, il est peut-être temps de faire un point sur la musique que jouent The Avener, Feder, Synapson et toute leur génération.

Depuis quelques années, un nouveau mouvement émerge bien au-dessus des traditionnelles sphères souterraines. Une musique hybride, mêlant relents de club et construction pop. Cette esthétique, c’est celle qui fait notamment les beaux jours de The Avener, Feder ou encore nos rédacteurs en chef invités de ce week-end : Synapson.

Alors que celle-ci est en train d’envahir les radios et les playlists des kids, nous avons tenté de définir avec eux les frontières de ce qui devient aujourd’hui un véritable registre à part entière.

“L’appellation Deep-Pop nous semble juste : nous produisons des chansons électroniques” explique le duo Synapson. En France, le premier vrai grand hit, sinon marqueur, du genre a certainement été le remix de Lilly Wood & The Prick par Robin Schulz. Voyez donc : une guitare folk, un pied électronique, une construction qui tient plus de la pop que de la boucle électronique et le tour est joué. L’hexagone prend une claque, les parents et leurs marmots clubbers s’accordent sur un morceau, et les radios fondent.

Pas avides d’un nouveau hit, celles-ci découvrent alors que, sur Soundcloud, des artistes font depuis quelques années le même genre de tracks. La locomotive est lancée : voici comment une musique électronique ignorée car trop pop pour la presse spécialisée va faire un grand bond dans les charts.

Je crois que la “deep-pop” commence à prendre forme avec Pillow Talk

Au départ : la pop

Dans l’esprit de ces producteurs, il n’y a pas forcément de filiation entre leur musique et celle des saints patrons de la deep house historique comme Larry Heard ou Marshall Jefferson : “Je crois que la “deep-pop” commence à prendre forme avec Pillow Talk. Ils avaient ce truc très mélodique, presque chanson, avec des paroles”.

Loin de se revendiquer d’une déviation de la musique de club, les deux Synapson parlent d’insertions électroniques dans la musique pop pour expliquer leurs créations. Au départ de tout ça, il y a l’édit, le fait de transformer un morceau sans avoir les pistes séparées : “The Avener a fait un album dans ce sens, nous en avions une énorme collection sur Soundcloud : à la base de notre musique, il y avait des morceaux sur lesquels nous imaginions un pied ou une rythmique un peu plus dansante”.

L’importance des édits

La pratique de l’édit va poser chez eux les bases d’une musique qui n’a plus ses racines dans le club mais bien dans le home-studio : “On en a marre d’être appelés “DJs”. On est d’abord des producteurs. Nous, mais aussi Feder, The Avener et tous les autres, devons être considérés comme des musiciens avant tout. Nous sommes des enfants de la génération internet”. Car avant de scorer dans les clubs, c’est surtout sur la toile qu’ils vont se faire un nom.

Décomplexés des contraintes de la viande à DJ (intros à rallonges pour faciliter la synchro, format parfois très “uniformisés”), ils mettent d’abord leur groove au service d’une écoute de salon : “On fait vraiment des chansons. Par exemple, pour notre album Convergence, il y aura des versions club. Elles ne seront disponibles que sur les plateformes dédiées aux DJs. On refuse que les auditeurs lambdas puissent se taper deux minutes de percussions avant que le morceau parte parce qu’ils ont choppé le mauvais fichier”.

Succès public, rejet critique ?

Qui a encore besoin de la presse en 2015 pour émerger ? C’est la question que pose le duo quand il lâche, en rigolant : “The Avener a eu de sales critiques dans Tsugi ? Vu comment il cartonne aujourd’hui partout dans le monde, il ne s’en porte pas plus mal”. L’aval des journalistes spécialisés, ils n’en ont cure : ils remplissent les salles (et notamment les Zenith pour la tournée Flash Deep), explosent les compteurs de vues et passent en rotation massive à la radio.

Pourtant, ils se défendent de faire une musique bas de gamme taillée pour les ondes : “On veut faire une musique abordable mais qui reste de qualité. Il ne faut pas oublier que notre premier morceau à être passé en radio est un track très world chanté par un Burkinabé”. Et n’oublient pas qu’il faut peut-être séparer un bon grain parmi l’ivraie : “On ne sent, par exemple, pas très proches musicalement de Robin Schulz, bien qu’on respecte son succès”.

Ce succès, d’ailleurs, est jusqu’ici toujours au rendez-vous. The Avener est disque d’or en France, Feder est disque de platine dans plusieurs pays. Ils auront beau se faire pilonner par la presse spécialisée, les foules se massent pour voir en live ces morceaux, et c’est, comme souvent, le public qui fait le succès. Ce rejet critique face à un véritable engouement populaire rappelle la nouvelle musique électronique de stade américaine, dite EDM. D’ailleurs, quand on fait ce parallèle, les artistes sont loin de le rejeter : “L’idée d’être la réponse européenne à l’EDM nous plaît bien”.

Retrouvez Synapson, rédacteur en chef invité du 16 au 18 octobre 2015