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Duchess Says : le meilleur groupe d’Amérique du Nord ?

Les saints patrons de la scène punk Montréalaise se sont déjà mis un continent dans la poche. Vu leur live au FME, leur prochain album devrait leur permettre de dominer allègrement l’Europe.

Ils ont presque sauvé le FME à eux tout seul. Leur performance en tête d’affiche de la partie rock du festival a fait trembler les murs de la petite ville de Rouyn-Noranda dans laquelle avait lieu le rassemblement.

Après deux albums puis 4 ans d’absence, c’est d’abord le label Teenage Menopause qui a offert aux spécialistes des signes de vie du groupe à travers un EP commun avec les belges du Prince Harry, sorti en première partie d’année. Cette rencontre entre l’école américaine du show exacerbé et celle de la frappe sonore européenne tenait du choc des titans transatlantiques.

L’école du show

“Duchess Says, c’est le live le plus impressionnant que j’ai eu l’occasion de voir dans ma vie” nous ont lâché, en substance, plusieurs personnes de confiance au détour de diverses conversations. Alors que le groupe fignole son prochain album, d’ores et déjà nommé Séances Nouvelles, on avait décidé de profiter de notre virée québécoise pour aller vérifier si ces affirmations tenaient de l’auto-persuasion ou si ces folles promesses pouvaient être tenues.

En discutant de cet état de fait – l’Europe rock à genoux devant les Duchesses – avec leur tour manager, on aura un début d’explication : “Chaque spectateur sort du concert avec un souvenir qui lui est propre, une expérience directe avec Annie-Claude”. La chanteuse du groupe nous en fera une démonstration quelques heures plus tard en live, lorsqu’elle viendra écraser l’épaule de votre serviteur de sa botte pour s’en faire un piédestal.

“Art de la scène”

“Au départ j’avais une retenue : quand tu aimes la musique, tu as rapidement un idéal de ce que tu voudrais dégager sur scène. La plupart des gens essaient de calculer ce à quoi ils vont ressemble en live, à travers la manière dont ils s’habillent, ce qu’ils disent entre les morceaux. Le secret pour moi, c’est juste de pas essayer d’être quelque chose en particulier. J’ai beaucoup de défauts, je ne veux pas les cacher. Au contraire” raconte la leadeuse du groupe. C’est elle qui tient le concert de bout en bout, ses camarades, en retrait, lui laissant toute la place dont elle a besoin pour faire exploser la fosse. En effet, elle est là, maintient sans cesse l’attention par ses (as)sauts incessants dans la foule et autres regards (trans)perçants.

La force de Duchess Says est peut être finalement de ne pas jouer une musique trop violente. Au contraire, pour que leur chanteuse puisse enchaîner les “body surfing” et autres frasques sans s’accorder la moindre pause durant une petite heure, il faut que le groupe soit des plus souples. Au fil du temps, on sent que le quatuor a développé un schéma rodé et qu’il sait parfaitement retourner une foule. Comme lorsqu’il déroule dans la fosse un ruban de tissu de plusieurs mètres et le laisse choir sans plus de manière : le public se le refile, joue avec, s’en amuse et prend conscience d’être lui-même partie prenante du spectacle. Arrive alors un morceau turbinaire et le tour est joué : comme un seul homme, la foule s’abandonne et saute en tous sens jusqu’à l’épuisement.

Plus que du rock ?

Passé ce concert qui, oui, a su justifier tous les compliments de nos compères bien informés, il est temps de se replonger attentivement dans la discographie du groupe. En résumé, deux albums jouissifs et un petit paquet d’EPs très directs signés sur des labels indépendants. Le groupe n’a pas les dents qui raient le parquet : “On a décidé du split avec le Prince Harry un soir vers 2 heures du matin. Je crois qu’on ne s’en souvenait plus en se reveillant le lendemain. Mais Elzo, de Teenage Menopause, lui, s’en rappelait”. Une configuration économique que ne les a pas empêcher de s’offrir déjà plusieurs tournées triomphales en Europe, passant notamment à Paris par la Villette Sonique ou le Point Ephémère.

Surtout, il faut comprendre que les mimiques hantées de Annie-Claude ont aussi leur part de mysticisme : l’ensemble de leur création est basé sur le concept de la Church of Budgerigars – l’Eglise de la Perruche. Une proto-religion qui dépasse le simple statement : “La Perruche est la base de Duchess Says. C’est même la base de mon inspiration. L’image de cette Perruche m’inspire pour faire des paroles, des chansons et même tout ce que je fais” affirme la chanteuse.

C’est aussi un merveilleux artefact autour duquel rassembler des fans, qui ont là de quoi se réclamer d’une grande idée aussi brumeuse qu’iconoclaste : “On fait actuellement un documentaire sur l’Eglise. On veut éclaircir cette idéologie, mais pas trop : c’est abstrait et c’est très bien comme ça. Je ne serais pas à l’aise à l’idée que ce soit trop défini. C’est d’ailleurs pour ça que la musique est le meilleur support : c’est plus ouvert qu’une image fixe et définitive” poursuit-elle.

Le prochain raid en Europe sera fatal

Actuellement, ils passent leur temps en studio à fignoler leur nouvel album. Les morceaux inédits qu’ils ont lâché lors du concert annonce une couleur moins synthétique et plus bruyante. Surtout, ils veulent pousser la transmission de la parole de la Perruche plus loin : “Pour cet album, on veut faire de véritables messes, bien plus que de simples concerts”.

Une chose est sûre : toutes les conditions sont réunies pour que Duchess Says viennent reprendre leur place en Europe malgré quatre longues années de quasi-absence discographique. Tout est là : une pop énervée, un show traumatisant, des tracks catchy et un storytelling-concept charmant. Le Canada – l’Amérique ? – est toujours à leurs pieds et, sauf incident industriel, l’Europe ne tardera pas à l’être à nouveau, aussitôt que Séances Nouvelles, leur prochain long format, sera sorti. Vous auriez ainsi bien raison d’aller vous informer et vous équiper, si ce n’est pas encore le cas, de leurs précédents albums dès maintenant.