On a rencontré le collectif Fauve, quelques heures avant son concert aux Francofolies. Retour une année de succès.
Villa Schweppes : Pourquoi tant de secret autour de Fauve ?Fauve : C’est de la pudeur. Quand on a commencé à mettre des mots sur le projet Fauve, on s’est tout de suite dit qu’on ne voulait pas mettre nos visages dessus. Par contre, visuellement, on a essayé de pallier le truc en ayant un logo, le égal barré ou la barre du F qui tombe.
C’est pour vous garantir une tranquilité ?
Non, c’est presque l’écrin de Fauve. Ça nous rassurait de pouvoir rester dans l’ombre. C’est une analogie qu’on fait souvent, quand tu vas chez le psy tu peux vider ton sac parce que tu sais que personne ne sera au courant. C’est comme un confessionnal, et bien Fauve c’est pareil. On voit souvent marqué “ils cultivent un certain goût pour le mystère et l’anonymat“. On ne l’a jamais vraiment voulu. D’ailleurs sur scène on se montre, on ne porte pas de masque. Mais on a eu l’idée de montrer des vidéos pour détourner l’attention de nos visages.
Le côté anonyme est assez utile. On n’est pas que les cinq sur scène, on est un collectif. C’est une marque de respect pour les gens qui sont dans l’ombre. Aujourd’hui ça nous fait peur aussi, c’est extra mais ça fait peur. On n’a pas envie que les gens nous voient comme des entités abstraites. On veut garder les mêmes rapports avec nos proches, nos amis et vous !
Avec cette notion de collectif, c’est pas difficile pour vous de garder une certaine individualité ?
C’est une question qui revient souvent mais en fait ce qui se passe c’est qu’il n’y a pas de règle. Tout marche à l’investissement personnel. Si quelqu’un a quelque chose à dire, il le fait, il y a de la place pour lui. On sait faire la part des choses, il y a Fauve qui est une bonne partie de notre vie, notre thérapie et il y a nous. Notre but dans la vie, c’est un peu cucul, mais c’est être des gens bien dans nos vies perso. De s’accomplir en tant que personnes.
Vous parlez dans vos chansons de vos états d’âme et vous avez trouvé un public. Est-ce qu’il y a d’autres sujets que vous voudriez aborder maintenant ?
La maltraitance animale (rires). On n’en parle pas assez. Non en vrai, on est assez peu politisés mais ça nous intéresse. Enfin, notre support d’engagement est surtout humain. Si la politique devient une préocupation, et bien on en parlera. Mais on ne veut prêcher aucune parole, toutes les choses dont on parle, on en parle pour nous-mêmes avant tout.
C’est un exutoire ?
Exactement. On avait le besoin d’expulser des choses. On voulait s’auto-soigner. C’est super si ça a aidé à des gens mais c’est vrai que ce n’était pas le but premier.
Vous dites que ça ne regarde que vous mais la force de vos messages, ce que vous vivez, tout le monde le vit !
Oui c’est vrai et ça nous touche de voir ça. On en retient une profonde gratitude, ça nous permet de vivre des choses incroyables. On a aussi le sentiment d’être moins seuls et ça a changé notre regard sur les autres. On va continuer de faire comme on fait. On se dit, on l’a fait pour nous et ça a aider des gens donc si on continue ça aidera peut-être encore d’autres personnes.
Vous pensez qu’on est une génération déprimée ?
Oui, on est une génération déprimée mais aussi un pays déprimé. Dans Fauve, on est déprimés, enfin jusqu’il y a peu de temps. On a de la force ensemble, on est teigneux ensemble. Ça nous a permis de faire des choses qu’on ne pensait pas être capables de faire. Fauve a bouleversé notre vision de nous-mêmes, des gens, de notre pays. On entend souvent “ouais Fauve c’est un groupe de bobo parisiens”. On ne va jamais en boite franchement ! Au départ, on voyait qu’il y avait des réactions et on avait peur de véhiculer une image qui n’était pas nous mais après on a tourné dans toute la France et on a découvert des gens géniaux. En fait, on a vu qu’il y a plein de gens qui pensent comme nous. On nous dit qu’on est des assistés, des gogoles, mais on n’est pas des pédales merde (rires). On n’est pas homophobes hein vous avez lu les textes on n’a pas de problème avec ça! (rires). Quand je vois ce qu’on a été capables de faire en terme d’écriture, de concerts, de tout ça, je me dis que ce n’est pas vrai, on est tous capables d’y arriver !
Votre premier album était autoproduit. Est-ce que avec la notoriété vous arrivez à garder une certaine liberté ?
Encore plus oui ! On a dit non aux labels maintenant ils le savent. On n’a rien contre eux mais on préfère bosser avec notre propre label. Quand on a commencé, on faisait tout nous-mêmes. On allait même déposer des cartons à la Fnac mais c’était quand même galère donc on a juste pris un distributeur. On va rester sur les mêmes règles pour la deuxième partie je pense. C’est beaucoup de taf mais on aime bien le faire. On aime mettre les mains dans le cambouis.
Vous vous sentez comment à quelques heures de votre concert ?
Moi perso je suis surexcité. C’est dommage qu’il pleuve mais apparement ça va s’arrêter donc c’est cool. On partage l’affiche avec IAM, les Casseurs Flowters. C’est ouf ! On va peut-être croiser Akhenaton dans les loges, je ne sais même pas comment je vais pouvoir ouvrir la bouche. C’est un mec avec qui on a grandi, qui nous a construits. IAM c’est une partie de notre éducation.
Qui aimeriez-vous rencontrer sur le Vieux-Port et que lui diriez-vous ?
Et bien Akhenaton ! J’aimerais lui dire simplement merci. C’est un des rares artistes qui dans ses textes mélange violence, mélancolie, poésie, courage et qui fait aussi un peu de social.
Vous avez une killer track ?
Ouais, tout à l’heure on écoutait DJ Visage “Schumacher”, ça nous met la patate (rires).
On aime aussi “Devant ma nuque” de Non Stop. C’est un truc des années 70.
Et enfin, “Flavor” de Girls In Hawaii (il mime la guitare de la chanson).
Quoi de prévu pour la suite ?
Cet été les festivals, les vacances, puis des vacances studieuses car on va devoir finir les textes de la partie 2 de l’album. En septembre on enregistrera, puis octobre, novembre, décembre, on fera tout l’à côté : le mixage, la pochette de l’album, les vidéos… Il y a du taf !