Skip to content

The Pale Emperor : comment Marilyn Manson est devenu une icône culte

Marilyn Manson sort son nouvel album le 19 janvier. A travers ” The Pale Emperor “, il se transforme en figure iconique et universelle, à l’image d’un Nick Cave ou d’un Johnny Cash. Comment le cauchemar goth est-il devenu un monstre sacré ?

The Pale Emperor est l’excellent nouvel album de Marilyn Manson. Une production passionnante, une adaptation de lui-même dans le sacro-saint registre blues rock à l’américaine, un lancement français chez nos confrères des Inrockuptibles : définitivement, quelque chose s’est transformé dans l’image du chanteur.

Retour sur cette mutation entamée il y a quelques années pour comprendre de quoi ce nouvel album est l’aboutissement.

Un revirement envisagé dès les 00’s

Tout semble commencer au milieu des années 2000. Après avoir terrorisé les puritains du quatre coins du monde à travers ses textes, choix et mises en scène provocatrices, embourbé dans les polémiques – Colombine, notamment – Manson semble avide de proposer autre chose que les coups d’éclat qui ont fait de lui un icône goth-teen majeure.

Marilyn Manson commence visiblement à rêver de supports plus nobles à son expression. Le garçon embourgeoise alors notamment son image en ouvrant une galerie d’art à Los Angeles, dans laquelle il exposera.

2010, comme un changement d’âge

Les choses s’accélèrent cinq ans plus tard : voilà Brian Warner – de son vrai nom – dans un court, puis un long-métrage de Quentin Dupieux (Mr Oizo), le réalisateur arty le plus pop de notre époque. Ni une ni deux, il illustre son album de 2012 “Born Villain” d’un court métrage réalisé par le déjà très intello Shia Labeouf. Loin de rejeter quinze ans de création, Manson resitue l’imaginaire qui l’entoure dans un univers propre à la conquête de nouveaux territoires.

Comme lui, son public s’est aussi assagi. Il faut aujourd’hui qu’il nourrisse l’esprit de fans qui sont devenus de bons trentenaires, plus une seconde émus par des exubérances promptes à séduire les jeunes gens. Leur appétit n’est plus le même. Exit le trash, voilà venir une certaine sobriété énigmatique. Exit les tenues en bas résille, c’est Saint Laurent qui l’habillera désormais.

La mode, la consécration de l’objet pop

Warholienne, la mode a toujours su saisir et sacraliser des modèles devenus des figures hors du temps. Plus qu’un moyen, le rôle d’égérie de Marilyn Manson pour la collection Saint Laurent Printemps-Eté 2014 est la preuve factuelle qu’il est, définitivement, entré dans le patrimoine commun, au même titre que Kim Gordon – Sonic Youth – ou les Daft Punk.

La pochette de The Pale Emperor, entre flou sobre et costume taillé au millimètre, trace ouvertement avec l’image entre difformités et ambiances glauques qu’il entretenait jusqu’ici. Manson se faufile dans une parure d’un goût sûr pour illustrer un album dont les choix de réalisation le sont tout autant.

The Pale Emperor, une incarnation musicale

La mutation se conclut évidemment sur disque. Après avoir débuté sous le parrainage de Trent Reznor, Manson avait dressé un équilibre adroit entre les codes de la musique “métal” (au sens large) américaine et des mélodies et des structures abordables pour tous. Sa signature sonore ? Saturations grasses, batterie surmixées et l’héritage électronique ambiant de Nine Inch Nails comme liant entre les différents morceaux. Pour des rendus plus (90’s) ou moins (00’s) réussis.

Cet aspect a progressivement muté depuis le début de la décennie, pour aboutir à l’album que nous pouvons écouter aujourd’hui. Les choix mélodiques, son groupe les a conservé en les plaquant sur des choses plus intemporelles : les distorsions sont devenues des crunchs plus nobles, les rythmiques sont aujourd’hui moins agressives que solennelles. On trouve des choix de réalisation qui rappellent même le minimalisme de groupes comme The Kills. Un grain nouveau sur s’est déposé sur ces morceaux.

Ce disque est un album de blues rock dans la plus grande tradition américaine. Si sa composition est clairement issue d’un bois mansonien, il tend, loin des roulements de mécaniques, à jouer dans la cour des mythes. C’est justement ce que tous les choix de réalisation tendent à indiquer : avec The Pale Emperor, . Une figure intouchable, déclinable, patriarcale mais tapissée de controverse dans la culture américaine.