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Syro : 5 questions essentielles sur le nouvel Aphex Twin (et nos réponses)

Le temps de trois graffitis et un dirigeable puis SYRO devenait le nom d’un projet que personne n’attendait plus : un nouvel album d’Aphex Twin. Nous l’avons écouté, nous vous l’expliquons en cinq questions.

Cette semaine la presse était invitée aux côtés de Pedro Winter, Jackson & his Computer Band (camarade de label) ou Clara 3000 à écouter ce Syro en fixant le logo lumineux d’Aphex Twin dans le noir. On ne vous cache pas que ce dernier est resté imprimé sur notre rétine et pour ce qui est du système cognitif voilà la FAQ dont vous rêviez :

Ça valait la peine d’attendre treize ans ?

Oui. Disons le tout-de-go : le jeûne en vaut la chandelle. D’un autre côté, affamés que nous étions à l’idée d’entendre à nouveau le cygne noir de l’électronique, nous aurions pu gober n’importe quoi. Et prendre même un mauvais leak pour des lanternes.

Si vous aviez été déçus de l’hyperteasing Boards Of Canada l’an dernier, assister au jeu de piste (graff/dirigeable/deep web) qui a mené à l’annonce de cet album pouvait vous laisser présager le pire. Syro ravira ceux qui n’ont jamais reçu l’Intelligent Dance Music (ou le breakbeat/breakcore/braindance et cie) comme une grossièreté et donne encore au I d’IDM un sens labyrinthique. Richard D. James a toujours (plus ou moins) dissimulé son visage derrière celui qu’il a fabriqué artistiquement et si nous pensions en voir un rajeuni, doté de rides d’expressions, voire de nouvelles expressions… eh bien… rien : le temps n’a aucune emprise ici.

Qui est Aphex Twin en 2014 ?

Celui de 2000, à n’en point douter. Syro donne un sentiment d’ellipse, de retrouver le personnage quitté lors de Windowlicker en 99. James est toujours joueur, toujours farceur. Il continue à évoluer dans un monde où les Beatles comme AVIICI ne sont pas et n’ont jamais été. Il se permet de réemployer les codes de tout, d’oser là où quiconque verrait une idiotie et l’employer très sérieusement. C’est toujours lui, l’Aphex de …I Care Because You Do dans l’acid ou dans son single qui sortirait d’une session de Windowlicker. Oui AFX est passéiste, oui. Mais nostalgique de son passé. C’est de l’Aphex Twin taillé dans sa glorieuse période, de l’Aphex Twin classique. Soit vous trouvez ça périmé parce que l’IDM aurait dû cesser début 2000, soit vous trouvez que ça n’a pas d’âge et dans cette intemporalité, Syro est un moment de bravoure.

En somme l’Aphex Twin, a une douce nostalgie de cette époque récente où l’on fantasmait son futur et où le New York Times le qualifiait “de musique classique du prochain millénaire“. Le temps a montré que le quotidien n’avait pas tort. Sans pour autant avoir complétement raison.

C’est bien Syro ?

Difficile à dire. Aphex Twin ça n’a jamais été ni bien, ni foncièrement mauvais. Mais une chose frappante ici est que cet album n’en est pas un. Il porte le qualificatif d’album tandis que Syro devrait se nommer Rare Works & Unreleased puisque c’est une collection à la cohérence toute approximative de travaux réalisés sur une période de treize ans.

Sous le capot, Aphex Twin s’empare ici de sons interdits et les fait voler comme un paquet de confettis. Il est capable d’accélérer de la jungle et d’en faire une matière viable. Syro est aussi une cascade de son Windows 95, d’accidents informatiques, où l’auditeur ne boit pas nécessairement la tasse. Mais plus curieux encore est ce sentiment d’être hameçonnés sans même comprendre où est le hook. Par certain aspects, Syro est un mindfuck.

S’il entretient parfois quelques sentiments pour le funk et la musique noire cet album joue sur l’articulation permanente entre acid, jungle, breakbeat et techno. Toujours exécuté avec une complexité dans l’arrangement et une vue d’ensemble souvent désarmante. Via ces quelques pensées pour Selected Ambient Works 85-92, on sent que Syro est un Aphex Twin dans sa zone de confort : la comédie électronique en techno d’onomatopée.

Aphex Twin était un artiste se réinventant à chaque album. C’est en 2014, un artiste qui ne (se) cherche plus mais s’est définitivement trouvé. Il surprend en ne cherchant plus à surprendre. Plus complaisant, il donne à écouter ce que l’auditeur souhaite entendre, sans pour autant sombrer dans la paraphrase ou le mimétisme. Pas démago pour un sou, on verra dans Syro une démarche affectueuse et généreuse.

Pour qui est ce nouvel album ?

La fanbase archétypale faite d’usagers de forum. Les ayatollahs du son et de la technique et du son apprécieront aussi. Mais des individus bien habillés, des amateurs de puzzles ou les early-adopters de Warp première heure y trouveront leur compte.

 

Aphew Twin est-il mauvais pour la santé ?

C’est une question idiote mais je me remercie de la poser. Non ce n’est pas mauvais pour la santé ; néanmoins il nécessite du repos et une bonne santé pour être ingurgité intégralement. Pour vous préparer au moins, traversez à nouveau les …I Care Because You Do, Selected Ambient Works 85-92et Windowlicker.