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Solange vient peut-être de sortir un nouveau classique du R’n’B…

La plus grosse erreur que l’on puisse faire en parlant de Solange Knowles, c’est de considérér qu’elle n’existe que parce qu’elle est la soeur de Beyoncé. Avec A Seat At The Table, Solange vient peser dans le débat public. Mieux : elle prouve tout ce qu’elle avance.

Solange Knowles (ou, plus simplement, juste Solange), vient de sortir son troisième album solo. Peut-être la chose la plus douce que l’on ait pu entendre cette année. Voilà une quinzaine d’années que Solange est “dans l’industrie”. Deux septennats et des poussières durant lesquels sa voix de diva aura pris le temps de se développer, pour enfin arriver à maturité en 2012 avec True. Un EP qui enferme l’essence de sa musique, et qui prouvait 4 ans avant A Seat At The Table que Solange n’est plus juste une compositrice, une conseillère, une actrice ou une remplaçante de luxe.

Les moins érudits connaissent Solange pour un malheureux coup de savate asséné à son beau-frère, Jay Z. Les autres auront lu l’un de nos articles sur son travail. L’ex-Destiny’s Child (oui, oui) est arrivée dans la musique à l’âge de 16 ans. Une compositrice et une parolière de talent qui finira, en 2013, par monter son propre label.

La fierté dans l’engagement

Solange se trouvera artistiquement en 2012 : “Losing You” est un immense succès populaire, et l’EP sur lequel le track figure est encensé par la critique. C’est le moment pour la belle de continuer le charbon : entre deux gigs en tant que créative artistique / ambassadrice pour Puma, elle commence l’écriture d’un nouvel opus, celui qu’on appelle pompeusement “celui de la maturité”. Elle y invite Lil’ Wayne, The-Dream, Kelly Rowland, Sampha, Kelela ou encore BJ The Chicago Kid et Q-Tip.

A Seat At The Table est avant tout une oeuvre politique, bien avant d’être un projet purement personnel. À l’heure où, aux Etats-Unis, le simple fait de ne pas être blanc peut vous faire tuer par la police, Solange chante la raison. Elle appelle à l’épanouissement personnel, clé de la paix sociale. Dans “Interlude : For Us By Us”, dans lequel intervient son idole, le légendaire Master P, on entend notamment : “Ils m’ont offert un contrat d’un million de dollars, le chèque attendait. Par contre, mon nom n’apparaîtrait pas… Mon frère me disait “Tu aurais du prendre le million !”, et j’ai répondu que non. “Tu penses que je vaux combien ? Si cet homme blanc m’offre un million, c’est que je dois en valloir au moins 10. Peut-être 40 ou 50”. Une citation lourde de sens lorsque l’on connait l’histoire mouvementée qu’a pu connaitre Solange avec l’industrie musicale et les majors…

A Seat At The Table : une oeuvre importante

Il y a du Diana Ross chez Solange. Elle marie furieusement bien les genres. Sur “Mad”, le 808 qui donne de la profondeur au morceau est magnifiquement comblé par la légèreté de la voix de sa chanteuse. On est là entre la ballade la plus douce et le r’n’b le plus industriel. Le couplet de Lil’ Wayne vient accentuer cette impression, avant que finalement, Solange ne sublime le track avec un final des plus doux. Un régal. On peut aussi citer “Rise”, l’intro magistrale de cet opus. Instrumentalement, c’est on ne peut plus juste. Un kick à la limite de la saturation vient souligner le synthé, qui s’impose doucement au fur et à mesure que la timeline avance. La seule constante ici, c’est la voix. Toujours juste et mesurée. Solange nous montre d’entrée que l’excès, elle ne connait pas. La justesse, c’est ce qu’elle fait de mieux.

Parfois, la chanteuse nous montre aussi qu’elle peut faire du “r’n’b traditionnel”. Voilà le principal reproche que l’on peut lui faire. Sa prise de risque reste, aujourd’hui, presque ordinaire. Mêler les genres de la sorte, c’est appréciable. Brasser kicks, snares et synthés de façon aussi homogène, c’est même une prouesse – à l’heure des sous-genres et des appellations toujours plus absurdes. Mais ce qui est important, au delà de la musique, c’est son contenu. Peut-être, après tout, que l’on doit se contenter d’apprécier la plus grosse prise de risque de cet album : le(s) message(s) qu’elle y inclut…

Dans “Tina Taught Me”, l’artiste spoken words Tina Lawson, que Solange invitait ici, se livre : “Il y a une beauté énorme dans le fait d’être noire. C’est une chose qui m’emplit toujours d’émotion, parce que je l’ai toujours su. J’ai toujours été fière d’être noire.” Peut-être ce que certains ont besoin d’entendre aujourd’hui (poke, Donald Trump). A Seat At The Table vise à s’asseoir autour de la même table que l’Amérique blanche. Pour montrer que les minorités existent, et qu’elles aussi, sont importantes.