Depuis quelques années, Jeremie Feinblatt et son équipe organisent sous le nom de Die Nacht des soirées à Paris. Mais pas n’importe lesquelles.
Depuis quelques années, Jeremie Feinblatt et son équipe organisent sous le nom de Die Nacht des soirées à Paris. Mais pas n’importe lesquelles. Ces évènements, dont vous serez au courant par le seul bouche à oreille (ou inscription sur leur mailing list), prennent souvent lieu dans des endroits étonnants, avec les DJs les plus cools du moment…On a voulu en savoir plus sur ce nouveau concept nocturne, qui n’en finit plus de bousculer les habitudes de la Nuit Parisienne. Une interview à dévorer avant de partir en soirée !
La Villa Schweppes : Comment est né le collectif Die Nacht ?
Jeremie Feinblatt : Je vivais et travaillais dans de nombreuses villes d’Europe (Prague, Berlin, Londres, Zurich), et de nature festif, je m’intéressais forcément à ce qu’il s’y passait une fois le soleil couché. De retour à Paris, à la grande époque de la mort de la nuit il y a quelques années, je me suis aperçu qu’ici, il n’y avait rien de tout ça, que tout était cantonné dans quelques clubs, sans trop de créativité. J’ai lancé Die Nacht pour apporter à Paris les meilleures pratiques d’une nuit décomplexée, hors club, que j’avais pu apprécier dans les autres villes. Je voulais montrer qu’ici aussi c’était possible, et par la même occasion, pousser d’autres collectifs à faire pareil.
VS : Pourquoi avoir choisi d’organiser des soirées ?
JF : Je tenais à partir de 2007 un agenda subjectif et sélectif sur la nuit, //ma soirée// l’autre agenda, qui narrait les périples d’un soir, tous les soirs. Rapidement, ce blog-agenda à beaucoup tourné, et à force de proposer aux lecteurs des soirées parisiennes je me suis créé un bon réseau de personnes qui me faisaient confiance. Beaucoup d’entre eux me demandaient pourquoi je n’organisais pas de soirées à mon tour. Pourquoi pas effectivement ? C’est devenu chose faite en 2008 avec la WOW! sous le Pont Alexandre 3, en face du Showcase.
VS : Avec toutes les plaintes de tapage et menaces de fermetures administratives, est-ce difficile de trouver des lieux prêts à accueillir les noctambules ?
JF :Très. C’est d’ailleurs, de loin, la plus grosse contrainte. Avec un lieu, une soirée peut se monter en quelques jours seulement. C’est d’ailleurs comme ça que notre première soirée à la piscine Molitor s’est montée. On a eu le lieu un mercredi pour une soirée le samedi. Donc 90% du temps que je passe à organiser des soirées, c’est à chercher des lieux. J’essaie en outre d’en trouver des inédits et “vierges” à chaque fois : forcément, il y en a de moins en moins. Les propriétaires sont nombreux à refuser. Soit c’est une question économique (une soirée en one shot ne les intéresse pas), soit d’autorisation (les lieux ne sont pas aptes à recevoir du public en soirée dansante), soit c’est simplement que la nuit fait peur.
VS : Les noctambules sont ils avides de nouvelles propositions ? Se lassent-ils vite ?
JF : Les parisiens agissent envers la nuit comme ils agissent dans tous les autres secteurs. On le sait, ils sont exigeants, râleurs et jamais contents. Mais c’est ce qui fait qu’ici on déborde de créativité à chercher des concepts nouveaux et inattendus. Les modes et tendances changent vite. Ceux qui ne s’adaptent pas perdent rapidement le public qui les a fait connaître.
VS : Pensez-vous un jour vous rattacher à un seul lieu ?
JF : J’adorerais ouvrir un club oui. Mais, encore une fois, il faut trouver le lieu parfait…
VS : La Nuit Parisienne est-elle d’après vous en péril ?
JF : Il y a quelques années, oui. Il y avait une lassitude ambiante et la presse, française comme internationale, ne s’est pas gênée de la faire remarquer. Récemment, je trouve que Paris s’est métamorphosée de manière assez incroyable. En quelques années, une vraie culture hors club s’est développée. Paris est maintenant une scène où tous les DJs internationaux aiment venir jouer. C’est assez incroyable cette transformation grâce à la volonté des parisiens, collectifs et acteurs de la nuit. Il y a toujours beaucoup de contraintes, et on les voit au quotidien. Mais la nuit en 2013 n’a rien à voir avec celle en 2009.
VS : Quelles sont les villes où il fait bon sortir d’après vous ?
JF : Autant être un peu original et ne pas citer Londres ou Berlin qui sont évidemment les capitales du clubbing en Europe. J’ai trouvé une vraie effervescence à Zurich dans ses quartiers en reconversion. Et Bucarest et Varsovie restent pour moi les capitales du clubbing alternatif en Europe. De manière générale, moins une ville est policée, moins elle a de patrimoine historique à montrer, plus elle a une culture alternative forte.
VS : A quoi ressemble le public de la Die Nacht ?
JF : C’est un public très mixte. Les filles en talons qui sortent du Baron pour se retrouver dans un hangar à Bobigny côtoient un public issu des free-party. Des jeunes du 8 ème côtoient ceux du 20. Des lycéens côtoient des trentenaires. La mixité du public est selon moi un gage important d’une soirée réussie. Et c’est ce que j’ai toujours voulu préserver avec Die Nacht : sans chercher à devenir branché, en communiquant par bouche-à-oreille uniquement (sans jamais faire d’event facebook), en stimulant l’intérêt des personnes curieuses, qui qu’elles soient.
VS : Votre plus beau souvenir à l’une de vos soirées ?
JF : C’est vraiment difficile. De voir 2000 personnes danser, s’aimer, sourire dans un lieu qu’elles découvrent me donne toujours autant de plaisir. Il n’y a pas de scène particulière, juste une grande fierté.
VS : Et le pire ?
JF : C’est facile. En 2011, nous avions été les premiers à investir la SIRA (usine maintenant bien connu des clubbers parisiens). L’usine avait été fermée depuis plus de 10 ans. C’était un risque important de réouvrir une usine pour une soirée, et malheureusement, à 1 heure du matin, en plein milieu de la soirée, l’électricité a sauté dans la moitié de l’espace. La mort dans l’âme. Tout le monde s’est rué à l’étage où la musique pouvait continuer, mais beaucoup ont du partir.
VS : A quoi ressemblerait la soirée de rêve ?
JF : A la prochaine Die Nacht 🙂
VS : Les DJs que vous rêveriez d’inviter ?
JF : Alors il faut savoir que je ne suis pas spécialiste et que j’ai un directeur artistique, Valentin, qui choisit les artistes. Du coup je ne préfère ne rien dire.
VS : Pensez-vous prochainement exporter vos soirées en Province/ à l’étranger ?
JF : Je pense qu’il n’y à pas un public suffisamment important en Province pour y produire une vraie Die Nacht, sauf peut être à Marseille où j’ai déjà pas mal de contacts. A l’étranger, par contre, c’est bel et bien prévu…
VS : Un indice sur la prochaine Die Nacht ?
JF : Fin juillet, des espaces extérieurs, des piscines, trois scènes, de jour comme de nuit… Les infos viendront bientôt !
VS : A quoi ressemble votre playlist du moment ?
JF : Oh comme tout le monde, Get lucky 🙂
Propos recueillis par Marine Normand