Quelques jours après la sortie de son premier album Charmer, nous avons rencontré Claptone, le représentant légitime de la nouvelle génération deep. On a lui a posé quelques questions à propos de sa mystérieuse identité, sa musique identifiable parmi 1000 autres et de son pouvoir à ne sortir exclusivement que des tubes.
Vous cultivez le mystère autour de vous avec ce masque vénitien doré que vous portez durant vos prestations. On trouve très peu d’infos sur vous, pensez-vous que l’anonymat permet au public de mieux se concentrer sur votre musique ?
Claptone : J’espère bien, parce qu’il s’agit avant tout de la musique. Je ne suis qu’un humble messager qui vous apporte du son à aimer et à détester, la bande son de vos vies. Ce n’est pas de moi qu’il s’agit, même si d’un côté, c’est une extension de ma liberté personnelle, pour être franc avec toi.
Vous avez sorti votre album le 16 octobre dernier sur Different Recordings/PIAS. Depuis quand le préparez-vous ?
Claptone : J’ai commencé à bosser dessus après que mon titre “No Eyes” ne devienne, par surprise, un tube, autant en club qu’en radio. C’était une face B à l’origine. Ce track m’a permis de voir qu’il était possible de faire une musique club et d’y intégrer un chant de caractère, pas une simple voix de studio basique. C’est ce qui m’a encouragé à faire un album complet. J’avais envie de travailler avec des chanteurs que j’aime et qui ont une voix différente de ce que l’on entend habituellement à la radio. Je voulais des voix que l’on n’avait pas encore eu l’occasion d’entendre sur des pistes house comme Nathan Nicholson de The Boxer Rebellion, Jimi Tenor, Clap Your Hands Say Yeah, Jay-Jay Johanson ou Peter, Bjorn And John. Je ne voulais pas non plus écrire des tas de chansons “FM”, pas plus que faire une compilation de tracks club. Il fallait que ce soit comme pour n’importe quel album classique : une collection d’oeuvres ayant une certaine homogénéité, dont l’ordre de lecture est réfléchi et que vous pouvez écouter en une seule fois.
Claptone, c’est réunir les gens par la musique avec des émotions
En quoi cet album est “Charmer” ?
Claptone : Pour différentes personnes, à différents moments, la musique de Charmer sonne de façon encore une fois différente, mais à cet effet charmeur.J’aime la connotation de ce mot, qui est principalement positive, mais il existe quand même un aspect plus sombre dans ce mot. Pour certains, c’est juste une bande son pour peu importe quelle occupation, pour d’autres, c’est de la feel-good music et ça les touche dans l’âme. Et il y a également ceux qui tombent complètement sous son charme, qui dansent sur mes beats comme un serpent sous le son d’une flute de charmeur de serpent. Mais n’ayez crainte, je ne vous veux aucun mal. Claptone, c’est réunir les gens par la musique avec émotions, et il n’y a aucune malice là-dedans.
La plupart de vos titres nous donnent envie de partir clubber sur la plage. C’est de ce genre de décor dont vous vous inspirez pour composer vos tracks ?
Claptone : Je ne pense pas que tout le monde ait la même perception de la fête. J’aime à penser que la musique permet à l’auditeur de l’intégrer dans sa vie. Une musique comme “Dear Life” peut vous rendre heureux, mais elle peut aussi vous rendre triste et mélancolique. Pareil pour “Party Girl” qui semble être une musique pour faire la fête avec cette voix un peu ironique et typique de l’humour noir de Jimi Tenor. “Puppet Theatre” avec Peter, Bjorn And John est une critique du capitalisme tout comme “Anything” avec Jaw. Donc oui, cela peut être un album fun mais avec plusieurs lignes de lecture.
“No Eyes” est un peu votre track best seller, qu’est-ce qu’elle a changé pour votre carrière ?
Claptone : C’est fou quand on regarde en arrière. “Cream” était le track le plus vendu sur Beatport au tout début de ma carrière et personne n’aurait pensé que ça allait arriver avec un autre morceau. C’est un gros succès. Et venue ensuite “Wrong” et ce fut la même chose. Le track B-side était “No Eyes” et ça m’a ouvert les portes des “vrais charts” et des radios. Tout le monde pensait que c’était le plus gros succès que je puisse avoir. Après ça, il y a eu mon remix pour “Liquid Spirit”, et ça a vraiment pris une autre ampleur. Le son était joué partout à Ibiza et a même fait partie de la playlist de BBC Radio 1. Tout ça a vraiment changé la donne pour ma carrière et la musique house en général.
Tes tracks deep ont quelque chose de spécial qui font qu’elles sont facilement reconnaissables. Décris-nous ta musique en 4 adjectifs.
Claptone : Organique, humaine, funky et émotionnelle.
Il y a beaucoup de featuring sur ce premier album avec des artistes venant du rock ou de la pop. Comment ça s’est passé pour travailler avec eux sur un album électronique ?
Claptone : Ce n’est pas un album électro. J’ai pensé à toutes ces voix qui me hantaient depuis quelques années et j’ai contacté ceux qui étaient vraiment nécessaires pour la production de cet album. C’est moi qui les ai choisies et moi qui leur ai envoyé des e-mails, qui suis allé a leur concert pour les convaincre de venir travailler sur Charmer. On peut y voir une approche romantique, pas comme dans 99% des cas où ce sont le label ou le manager qui choisissent le chanteur et achètent leurs services pour une session studio où un ghost producer en fait un hit radio. Là c’est plus personnel et proche du coeur.
En France, beaucoup de nouvelles têtes comme Feder ou The Avener émergent dans le domaine de la deep. Pour vous, qui est celui qui représente le futur de ce style musical ?
Claptone : Je pourrais avoir certains pouvoirs magiques, mais je ne sais pas lire l’avenir, je le crains.
Certains disent que Paris n’a pas à rougir de Berlin en ce qui concerne la musique électronique. Qu’est-ce que tu en penses ? C’est vrai que tu aimes particulièrement jouer en France ?
Claptone : J’adore ! Mais j’essaye de ne pas penser en terme de catégorie de jalousie ou même de pays, villes ou scènes. Je profite de chaque concert et si ça se passe outrageusement bien comme ma dernière date au Showcase la semaine dernière, j’apprécie encore plus ! Mais je respecte tous les publics et j’essaye de donner ce pour quoi je suis venu : la “Claptone experience”.
Charmer – PIAS – 16 octobre