À l’heure de la techno reine, on vous raconte la hip house que tout le monde a zappé. On en ressort les meilleurs tracks alors… Turn Up The Bass !
La hip-quoi ?
A chaque fois qu’un DJ s’aventure sur le territoire de la hip house, la réaction du dancefloor est toujours la même : “c’est Le Prince de Bel Air”. Oui et non. En effet, les flows et la façon de rapper sont bel et bien de la même époque, mais l’instru est loin d’être la même. Le générique de la série produite par Quincy Jones ressemble à un genre de Miami Bass, du early hip hop.
Le registre qui nous intéresse aujourd’hui est un mélange bâtard entre tout ce qui émergeait à la fin des années 80 : le hip hop et la house à la sauce de Chicago. De qui est venue cette idée saugrenue ? Un débat a eu lieu assez longtemps : The Beatmasters ont sorti un track correspondant au “son” du genre en 87 mais c’est Tyree Cooper qui a su capitaliser sur l’appellation en 89 avec le mega hit “Turn Up The Bass” en 89.
La glorieuse fin des 80’s
Mais dans les deux cas, le programme musical est assez ambitieux : des morceaux ultra rythmiques, très breakés, habillés de flows ultra énergiques et soutenu par des pianos samplés et des basslines presque acides. Le label DJ International Records va littéralement vivre durant toute la transition de décennies sur cette musique ultra optimiste et extrêmement fédératrice : ils sortent les deux poules aux oeufs d’or que sont Cooper et Fast Eddie.
La sauce prend et va vite prendre sa place dans la culture populaire : cette musique, si elle reste anonyme pour la plupart des gens, fait partie de ce drôle de patrimoine musical appelé “90’s”. La France ne va pas tarder à suivre, avec des essais finalement assez hallucinants comme le morceau de Rap Two “House of Afrika” mêlant sample africains, flows et synthé “habillage de docu des années 80”.
Avalée par la dance mania
En 89, c’est de Belgique que va venir l’explosion : fondé sous l’impulsion du producteur Jo Bogaert, Technotronic est un pantin au sein duquel on va faire tourner les musiciens et maximiser, à l’ancienne, les profits. Chanteuse-mannequin en playback, look stylisé : le morceau “Pump Up The Jam” va faire le tour du monde, nourri de la bassline de “Acid Life” de Farley Funk et des nappes cheesy de Marshall Jefferson.
À partir de là, la Hip House va se diluer dans la grande – et souvent horrible – famille de la dance music. Ça n’empêchera pas Tyree, Fast Eddie ou encore 2 in a Room de faire des dollars avec des tracks aussi populaires que “Wiggle It” ou “Most Wanted”. Le genre se noie très vite entre l’eurodance en pleine explosion (Gala), le Uk garage puis le grime anglais et le hip hop qui s’affirme downtempo.
Et aujourd’hui?
Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Difficile à dire. On a affilié une vague venue du haut du mainstream à la Hip House, mais à écouter de plus près, on est plus proche d’une nouvelle façon de clubber avec des flows que dans un vrai héritage. D’ailleurs, des tracks comme “212” d’Azealia Banks ou “Day’n’Night” de Kid Cudi ont plus à voir avec l’Angleterre qu’avec Chicago. Seuls les extrémistes d’Atari Teenage Riot ont réussi à proposer quelque chose avec “Midjunkies”, en mêlant électro violente et beat hip house. Esthétiquement, on accordera aussi une filiation à Kiddy Smile, le prodige dance français.
La musique qui a vécu entre 1988 et 1992 est considérée à part dans l’histoire de la musique : trop “commerciale” et millimetrée, pas assez noble: à l’image du “Finally” de Ce Ce Peniston, la production a jusqu’ici “mal vieilli”. Pourtant, pour le DJ “généreux” qui refuse malgré tout de se plier aux hits de club du moment, cette musique représente un espèce d’eldorado : ultra groovy, vocale, nourrie de références dites classes, maladroite mais attendrissante, la période représente l’intégration du “savant” dans le populaire et sait, encore aujourd’hui, mettre un dancefloor dans tous ses états.
Bonus: la Boiler Room de Tyree Cooper, toujours en activité, en 2013