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Panda Bear, Mark Ronson, Ghost Culture… Le rayon frais du 12 janvier

2015 a commencé, la musique est revenue alors nous vous aiguillions telles les locomotives dans la nuit vers les sorties de la semaine.

Panda Bear dans les 90’s

Qu’est ce qui agite la superette ? Panda Bear, le visage chagrin et surréaliste d’Animal Collective et növö-Beach Boy s’il en est qui rencontre la Grande Faucheuse sur son cinquième album.

On s’en relève la nuit ? On n’en ferme plus l’oeil. Lennox à 36 ans, la quarantaine approche, les inquiétudes fleurissent. Père de deux enfants, la mort devient un sujet de préoccupations insoupçonné. Et s’il a toujours cultivé quelque chose de passivement morbide, aujourd’hui la chose est tout à fait consciente. C’est même la colonne vertébrale de ce cinquième album, titré comme si l’on organisait ici une rencontre avec la faucheuse. Pourtant pas de dialogue ici. Ou alors avec lui-même. Lennox voyage en son âme et conscience, explorant en collaboration avec la faucheuse, ses angoisses. C’est sa peau qu’il confectionne ici, son rempart entre la menace extérieur et son intime fracturé, il dessine l’Homme enclavé dans le monde et les assauts que la vie moderne inflige à sa zone de confort. Une lutte molle, absolument pas dénuée de beauté, bien au contraire, s’incarnant dans des sérénades graves et défiant pourtant la gravité. Son visage ne change pas, il vieillit un peu, on retrouve la même voix dans la brume, ces même choeurs d’un seul homme, comme s’il fût lui-même tous les Beach Boys, ce même soin dans le chromatisme de ses harmonies, cette grâce, toujours omniprésente même si entachée aujourd’hui par son ambition de donner corps à son tumulte via des citations de la scène baggy des 90’s côté EMF et Saint Etienne. Un cinquième album cernant le noble dans l’ignoble.

La Souterraine plus libre que jamais

Pourquoi la supérette s’agite ? Depuis un an, on peut suivre avec un appétit non contenu les compilations gratuites de La Souterraine, qui met en valeur la musique francophone. On y a retrouvé et découvert de nombreux artistes qui nous ont passionné l’an passé. Le volume 5 lance l’année sur les chapeaux de roue.

Est-ce qu’on s’en relève la nuit ? Insomniaque ad vitam eternam à cause de ces compilations, nos médécins n’ont pas encore trouvé de solution pour nous guérir. A la sortie de cette nouvelle édition, ils se sont résignés. Alors que la foule attendait une sélection V.I.P. liée à la prise d’importance de la structure dans l’espace médiatique, ses curateurs ont rappelé leur engagement militant pour les artistes les moins connus médiatiquement.

Comme souvent, il y deux parties dans cette compilation : celle qui réinvente la chanson et celle qui envoie le français dans l’espace. Maud Octallinn, O, Silvain Vanot viennent régler leurs comptes aux balades textuelles, quand Medhi Zannad ou la super Requin Chagrin font monter la saturation. Deux énormes révélations au compteur : Marie Mathématique, qui malgré un son ultra Velvet Underground – ils n’auront pas volé la comparaison – proposent le scotchant “Sinon je serais autre chose” et le track qui lui succède, ce live krautrock de France au festival Humanist Sk. Ajoutez-y la présence de la psycho-active bonne mère des 70’s Emmanuelle Parrenin et une ouverture noise envoûtante de Sourdure : La Souterraine passe la 5ème avec une formule plus radicale et dangereuse que jamais. On pose le genoux à terre face à une telle prise de risque.

Ghost Culture est un pyjama en tartan

Qu’est ce qui agite la superette ? Ghost Culture ou le dernier poulain d’Erol Alkan qui est une nouvelle grosse chose après Daniel Avery.

On s’en relève la nuit ? Systématiquement appelé à s’installer dans la liaison Mockasin-Avery par la quasi-totalité de la presse, James Greenwood se voit réduit à un recrutement utile entre deux camarades de label (en l’occurrence Phantasy). Pourtant, Ghost Culture en raconte beaucoup dès son nom : s’il n’est pas facile à déceler, plutôt mystérieux, il reste néanmoins très transparent. Ghost Culture, c’est de la club music à songwritting, de la musique à danser qui ne se danse pas et de la musique produite par un homme de machines, à la fois house analogique et pop clavière. Petite coquetterie, Greenwood aime la house qui se chuchote, lui-même chuinte plus qu’il ne chante. Quant à son acid, il la secrète de manière à ce qu’elle se dilue dans une new wave propre, sèche et bien huilée. Des bangers de chambre, en somme, nocturnes côté couette, élégants comme un pyjama en tartan. Ce Ghost Culture confirme après Mockasin et Avery (justement) l’affection d’Alkan pour les albums clés-en-main et durables, où les hooks géants et les grossesses mélodiques enfantent un être voué à évoluer sur le long terme.

Mark Ronson envoie un nouveau disque de sa tour d’ivoire

Pourquoi la supérette s’agite ? Mark Ronson débarque avec un nouvel album. Qui ça ? L’un des producteurs pop les plus marquants de la dernière décénnie, avec au compteur des disques comme ceux de Amy Winehouse, Adele, Lily Allen, ou encore… Christina Aguilera. Il a surtout été auteur de l’excellent Record Collection, dont les hymnes se réverbèrent toujours dans un coin de notre esprit. Il sort aujourd’hui Uptown Special avec entre autres Bruno Mars, Stevie Wonder et son fidèle Andrew Wyatt en guest.

Est-ce qu’on s’en relève la nuit ? Le producteur, sur ce disque, semble avoir définitivement pris le parti de se placer hors du temps. On n’entend rien de ce qui fait la musique d’aujourd’hui : non, ce qu’il propose est un excellent disque de funk, de soul, de pop dancey. Ainsi, difficile de le contextualiser plus avant : le producteur est planqué en haut d’une tour d’ivoire et ne semble plus rien n’avoir à faire du pop-jeu. Son disque est-il bon pour autant ? Oui, globalement, et notamment grâce à des bombes comme le morceau “I Can’t Loose” ou la plage suivante, “Daffodils”, coeurs vibrants de ce disque. Passées les références aux classiques – des bons disques de soul, il y en a des centaines – c’est dans son traitement fin des éléments électroniques que le garçon brille le plus fort. Le disque s’infuse délicatement, et meritera l’achat d’une copie physique, pour avoir la liberté d’y revenir de temps en temps, comme sans y penser.

A écouter ici

Balkany Kordy, des blagues et de très belles tracks

Pourquoi la supérette s’agite ? Nouveau venu sur le très blagueur label Ascèse Records – qui gère aussi les créations de Michel Thor et Bagdaddy Kool – Balkany Kordy cache derrière son pseudo rigolo un partisan d’une techno romantique et riche. La supérette voit-elle donc arriver dans ses rayons un nouveau producteur de haute volée?

Est-ce qu’on s’en relève la nuit ? Oui. Enfilant nos pantoufles, on monte allègrement le volume de la sono au détriment des voisins du dessous pour danser toutes lumières éteintes. Ce EP Cotard Delusion explore les territoires du rêve à travers une combinaison rare de musique nerveuse et de synthétiseurs brumeux. Entre la jungle d’Amazonie, une crypte infernale et des athmosphères quasi-gregoriennes, Balkany Kordy impose sa superbe. C’est très beau, très étrange mais très immédiat, une réussite absolue.