On écoute en avant-première le nouveau maxi de Monomite, Pondicherry, à sortir ces jours-ci sur Vertv. On lui a envoyé quelques questions, histoire de déconstruire sa déconstruction en règle de la dance music.
Le label Vertv ne déçoit pas : après une première sortie incontournable signée Mad Rey, la maison fondée par Neue Grafik, Hybu et Ev4ns remet le couvert avec 6 nouvelles bizarreries signées Monomite. Au programme, des beats proches du hip-hop qui finissent par vriller, des pieds house hyperactifs en sortie de route constante : Monomite a brûlé les recettes de maman pour inventer une étrange et excitante musique de danse, entre garage cisaillé, bruit de la ville, obsession jazz et réminiscences discos. On a posé quelques questions à ce garçon qu’on imaginait plus en grand théoricien de l’esthétique du club qu’en zonard scotché pépère devant un jeu vidéo entre deux prods.
Villa Schweppes : La première chose qui frappe avec ce maxi, c’est son aspect très ludique, empirique. Comment produis-tu tes morceaux ?
Monomite : J’ai tendance à pas trop faire d’édit à la souris sur ordi, ça me barbe. Généralement je jamme tout, même les automations (quand ce ne sont pas les morceaux en entier). Ce qui me plaît dans cet EP c’est le fait que ce soit pas mal une sélection de ce que Neue Grafik aime chez moi. On a finalisé l’EP en une nuit, 2 jours avant que je me taille en Inde. Il a choisi parmi quelques tracks ce condensé de jams assez brutes.
Entre le track que tu as sorti récemment sur Komos et ce maxi, il y a un monde en terme d’ambiance, de textures. Te fixes-tu des limites sous l’alias Monomite ?
Ce track sur Komos, c’est une jam extrêmement sale, tellement que je savais pas où la caser. Je me suis dit que ça pourrait passer dans ce contexte. Je pense qu’en terme de production et de musique de manière plus générale, on se fixe forcément une tonne de limites, quand elles ne sont pas inscrites en nous. Le contenu qu’on produit rentre dans des codes culturels que nous nous approprions. J’entends là, par exemple, le charley de 909 classique, l’afterbeat qui tape le 2 et le 4 . On navigue autour de ces codes avec notre propre style à nous. Mais après, je m’en branle, demain je sortirai peut-être un projet de zouk-black métal, sous l’alias Lord Emile Gabriel Funkelstein666 où Donkey Kock, j’en sais rien.
Ça bouillonne à Paris en ce moment, je kiffe ça
Tu fais partie de cette vague qui déconstruit la house, y insère beaucoup de jazz, de hip hop : d’un style dédié à la fête, la house est-elle aussi devenue aujourd’hui “une musique savante” ?
Pour moi ça reste un truc que j’ai envie de faire sans trop réfléchir. Certes, il y des fois le soir je me tape des délires façon Jan Jelinek, Farben. Mais je suis tout seul dans ma chambre et il fait nuit noire. J’ai sorti pas mal de house parce que le support physique, la communauté et mes amis m’ont stimulé dans ce sens. J’ai pas mal traîné avec les Beat X Changers, mais avant ça, je ne connaissais pas vraiment la house. Ces fréquentations m’ont donné envie de saigner le délire. Au départ, je viens surtout du blues et du hip hop à la base (et des jeux vidéos). Je ne pense pas que ma house soit une musique savante, j’ai envie que ça reste quelques chose de très spontané. Pas un truc d’innovateur, juste : “fais ton truc, reste vrai, tu va forcément faire un truc original”.
On navigue autour de codes culturels
Entre les prods qui proviennent de Vertv, D.KO, Beat X, etc… Paris semble au centre d’une tornade house nouvelle après des années de techno “dure” : comment ressens-tu le mouvement ?
Ça bouillonne à Paris en ce moment, je kiffe ça, c’est vachement inspirant. Mais on aime bien se mettre dans des carcans, donc je vois souvent des soirées où ça ne mixe qu’un seul style toute la soirée et je trouve ça dommage. J’aime bien entendre multitude de trucs différents dans un même set. Je ne sais pas si je pourrais avoir un vrai avis sur le “mouvement”. En général, quand t’es dans ce genre d’ambiances, tu n’arrives pas a te rendre compte du mouvement dans lequel tu es englobé. Tu fais juste ton truc et tu surfes sur une dynamique commune. Puis en ce moment, je fais surtout des concerts avec Jazzy Bazz, et je joue trop à Rocket League. À l’avenir, j’ai juste envie de pouvoir avoir un espace où faire de la musique, dans lequel je peux enregistrer des trucs toute la journée, capter des moments de jam avec instruments, avec tous mes potes zikos de Paris et un son crados, genre Yesterdays New Quintet ou Butcher Brown.
Fêtez avec le gang au complet la sortie de ce nouveau maxi le 17 juin prochain à la Rotonde.