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Moderat : “Ce disque, c’est vraiment la distillerie”

Alors qu’ils enchaînent les salles combles aux quatre coins de l’Europe et viennent de sortir leur tout dernier album, III, on a pris un café avec le trio composite berlinois.

Villa Schweppes : le premier sentiment qu’on a en écoutant ce troisième long format, c’est qu’il est plus organique que les autres. C’était voulu ?

Sascha Ring : On n’a pas vraiment d’intentions quand on rentre en studio. C’était juste le mood. On n’a pas non plus de concept, c’est juste en bossant qu’on se rend compte qu’on aime un mood en particulier, du coup on suit ça. Je lis ici et là que cet album sonne comme mélancolique pour beaucoup de monde… Et je sais pas comment le voir perso.

Ça rappelle un peu le disque de Dark Sky que vous avez sorti sur Monkey Town. Quelles sont vos nouvelles influences ?

Sascha Ring : Je crois que nos influences ne sont pas musicales. Ces notions tournent plus autour de nos machines en studio. Beaucoup d’équipement old-school. On a de très vieilles machines ; des synthés analogiques, des modulaires plus gros que cette pièce. Donc oui, avant de bosser et d’écrire, on collecte le plus d’instruments possibles. On voyage beaucoup pour ça, Charlie ramène toujours des merveilles de ses voyages. Et après on fait un beat, à l’iphone.(rires).

On voit souvent la musique électronique être divisée en deux grandes catégories : d’un côté un pendant Kraftwerk, où la machine conduit l’homme et de l’autre, un pendant Jean-Michel Jarre, l’inverse. Quelle place prend la machine et son fonctionnement dans la composition ?

Sascha Ring : Je pense qu’au bout du compte, la machine n’est pas si importante que ça. On écrit la musique avant de la mettre en son. Nos machines influent juste sur l’atmosphère. La chanson en elle-même, on l’écrit, on n’a pas la choix. C’est un peu old-school, mais nécessaire. Pour être exact, on écrit des parties de chansons. Et puis après ça, on s’assoit et on décide de qui fait quoi, avant d’assembler le tout à la toute fin.

Vous pensez à la vie du morceau en club quand vous composez ?

Sascha Ring : Plus autant qu’avant je pense. C’est en fait déjà assez dur comme ça, alors si tu dois en plus penser à comment faire le truc pour qu’il marche en club… Je veux dire : bien sur qu’on sait qu’on devra jouer le son en live après, mais on sait aussi qu’on devra y apporter pas mal de changements.

Justement, à quoi ça va ressembler ?

Sascha Ring : Ca va nécessiter des réglages différents. Mais beaucoup de choses sont faites avec des synthés modulaires, ce qui veut dire que tu ne peux pas sauvegarder le son que tu en sors. La musique se passe mais elle est éphémère, les notes disparaissent, donc on va s’adapter.

On a réalisé que ce disque ne verrait le jour que si on bossait énormément.

Comment allez-vous techniquement vous y prendre ?

Sascha Ring : C’est simple, notre musique, avec cet équipement qui est donc différent, n’est plus synthétisée ! On sample beaucoup, du coup sur scène, on utilises ces mêmes sampleurs, ces drum machines et on prépare de là le meilleur live set possible, pour avoir la liberté dont tu parles. On ne veut pas mentir au public.

Sebastian Szary : Un live show electro c’est toujours un compromis entre la machine et l’humain. Donc non seulement on doit se distribuer le travail nous trois, mais on doit aussi se dire que telle machine fait ci, et celle là fera ça. C’est comme avoir un deuxième band, composé juste de machines. A nous d’optimiser le tout, tout en gardant notre liberté. Et nous, on peut improviser, car justement on n’est pas les machines.

Après vos deux premières rencontres discographiques, comment faites vous pour trouver de nouvelles inspirations ? Il y avait un challenge sur ce nouveau disque ?

Sascha Ring : Toujours, car on voit que c’est une belle combinaison, nous trois, et on aime trouver justement des challenges. Comment se réinventer en tant que groupe composite ? Pour le premier, on se remixait entre nous. Le second s’est fait super vite, et là, on a essayé de faire la même chose que pour le troisième. Seulement, c’était plus difficile. On a réalisé que ce disque ne verrait le jour que si on bossait énormément. Ce disque, c’était vraiment la distillerie ; on a du faire beaucoup de morceaux et ensuite, on a afiné le tout. Mais notre motivation repose dans le fait qu’on sortait de tournée et qu’on ait voulu enregistrer dans la foulée. A chaque album que tu fais, tu t’approches de la fin de ton inspiration, puisque justement tu viens de produire quelque chose. Du coup, tu dois chercher plus loin encore.

Vous vous sentez proche de courants musicaux actuels ?

Sascha Ring : Si on parle de la musique qu’on écoute, on est tous différents, mais on vient tous de l’underground, même si notre musique l’est moins. Mais on fait toujours de la musique comme telle. On continue à faire des DJ sets de ” musique underground “, pour y rester connectés.

Le groupe remplit de très grosses salles. Ca vous permet un confort nouveau sur l’aspect visuel du live ?

Gernot Bronsert : On travaille toujours avec le même collectif de Berlin qui s’appelle Pfandfinderei. On est sur la même longueur d’ondes et on se comprend. On aime les mêmes choses niveau design et graphique, donc ça marche depuis le début, et on a qu’une envie, que ça continue.

Avec vos projets de plus en plus gros, vous pouvez désormais vous permettre d’éviter les choses vues et revues…

Sascha Ring : On aime beaucoup les jets de flammes et d’eau, les lions sur scène etc… Plus sérieusement on s’en fiche de faire le big show, on veut pas de pyramide. On veut juste jouer la musique qui parlera le mieux visuellement. On a une approche différente, y a du storytelling et de la géométrie là dedans.

Gernot Bronsert : On n’a pas besoin d’être superstars. Mais devenir plus gros te donne de la liberté d’expression.