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Le producteur François X, né sous une bonne étoile

Lors de la soirée Technolita au Glazart, nous avons rencontré le DJ producteur Francois X. Le boss du label Dement3d en a profité pour nous parler de son amour pour DJ Deep, la finance et de Soulages.

La Villa Schweppes : Resident Advisor décrit ta musique comme de la techno “de deux heures de l’après midi au Berghain”. Ça te va ?

Francois X : J’imagine que RA fait référence à un moment précis ou les gens se laissent peut être emporter plus facilement. Moi je pense que ma musique est intemporelle. Mais tout dépendra aussi de la manière dont je vais l’amener, c’est une une question de feeling.

Et comment la décrirais-tu, toi, en trois mots ou adjectifs ?

FX : C’est dur de trouver les bons mots pour parler de sa propre musique, mais si je devais ne trouver que trois termes pour décrire la mienne ça serait “hypnotique”, déjà, puis “répetitive” et… “chimérique”, peut être !

C’est quoi la vision derrière ton label Dement3d ?

FX : Dement3d est né d’une histoire d’amitié entre Julien (Julien Haguenauer aka Heartbeat, ndlr), moi et notre panel d’artistes qui était à ce moment constitué de proches. Ce n’est qu’avec le temps que s’est profilé un esprit à partir de conceptions communes…

… À partir d’une certaine démarche intellectuelle ?

FX : Cet esprit s’est plutôt créé via une certaine démarche de travail, une éthique morale, et puis des influences musicales communes, évidemment !
Quant à la partie intellectuelle, nous essayons de créer des moments d’évasion et de réflexion en nous appuyant sur une esthétique visuelle forte (notre graphiste Matthieu Cannavo est un expert en la matière).

Ok et tu crois que Dement3d est en train de dessiner la techno française à venir ?

FX : Objectivement je ne pense pas, même si beaucoup de gens le pensent. Mais nous avons été peut être à un moment un catalyseur de nouveaux talents.

Tu as toujours connu DJ Deep, c’est un mentor pour toi ?

FX : Un mentor mais surtout un ami cher !

C’est lui qui t’a poussé à faire de la musique ?

FX : Oui, on peut dire ça… Cyril (DJ Deep, ndlr) est quelqu’un que je connais depuis un petit bout de temps. C’est un pilier dans le milieu électronique. Les gens de ma génération ont écouté ses émissions de radio et ont pu, grâce à lui, découvrir les multiples facettes de cette musique. Il m’a mis un peu le pied à l’étrier en signant mes trois premiers maxis sur son label Deeply Rooted. Il me pousse encore aujourd’hui dans mes retranchements (rire). Mais ce qui est surtout très enrichissant, c’est de pouvoir échanger nos différents points de vue avec nos expériences différentes. Une sorte de Melting pot du passé, du présent et du futur.

Qu’est-ce qu’a été le déclic pour devenir producteur ?

FX : J’ai commencé à écouter de la musique électronique et à acheter des disques à la fin des années 90. À l’époque, tu achetais de la musique de façon naïve, c’est-à-dire que tu l’achetais parce que tu l’aimais sans pour autant vouloir monter un groupe ou devenir producteur. Pour moi, la production est venue dix ans après, progressivement, le temps de digérer mes influences diverses et d’avoir le courage de débuter un domaine excessivement difficile.
Si l’on veut parler de déclic, je parlerais plutôt d’univers. J’ai eu une grande période ou la musique de Carl Craig me fascinait : ses ambiances atmosphériques, son univers de science-fiction… Je crois que c’est peut être l’envie de me perdre dans des nappes qui m’a donné envie de faire de la musique. Je voulais créer un rêve éveillé.

Comment on passe de la finance à la techno (Francois X a été trader, ndlr) ?

FX : Et bien un jour je me suis retrouvé au chômage et je me suis alors demandé si je devais ou pas rechercher un autre poste. Finalement il s’est avéré que ma passion a pris le pas sur mon envie de continuer dans ce secteur. La chance que j ai eu c’est d’avoir déjà un minimum d’expériences et d’actualités pour que la transition se fasse aisément. Mais, pour moi, ces deux mondes ne sont pas paradoxaux, puisque ce sont des métiers futuristes et technologiques….

Avoue, trader c’est un métier de chien ?

Fx : (rire) Ah non ! Le milieu de la finance a une vision globale des choses qui me plaît beaucoup, au contraire. J’y ai acquis une culture et un savoir qui me sert dans ma vie d’artiste !

Tu te qualifies de producteur lent. Qu’est-ce qui fait que tu produis si lentement ? Ce n’est pas une bonne chose de produire lentement ?

FX : Oui et non. Parfois c’est très contraignant de littéralement stagner dans son processus de création mais en même temps ça me permet d’avoir un peu plus de recul sur mon travail sans céder à la tentation d’une actualité trop chargée. Il faut parfois laisser vivre sa musique, ne plus en avoir le contrôle, pour mieux l’assumer par la suite. J’aspire quand même à faire une musique qui perdure un peu, et non pas quelque chose d’éphémère.

Tu as peur de la page blanche parfois ?

FX : Il faut parfois l’accepter ! Heureusement, mes vides artistiques ont toujours été suivis d’une énergie créatrice débordante.

Qu’est-ce qui, hors de la techno, t’attire pour produire de la techno ? Des références autres que musicales ?

FX : Je suis un grand fan de films de science-fiction, et de paysages reculés et fantastiques. Mais dire qu’ils influencent mon travail, c’est un peu abstrait. Après oui, on est évidemment tous constitués d’expériences de vie et d’un kaléidoscope d’influences diverses et variées qui jouent sur nos goûts, mais tout ça reste inconscient.

Oui c’est bien vu. On t’a croisé dans le Real Scenes Paris l’an dernier

FX : Oui, une expérience un peu bizarre… C’était quand même intéressant de voir avec quel regard nous sommes perçus.

Le documentaire relève quelque chose de notable, à savoir une nouvelle effervescence de la musique électronique et de la fête à Paris présentée comme le nouveau Berlin. Tu en penses quoi ?

FX : J’espère que nous avons quand même notre propre culture ! Il est vrai cependant qu’il y a une effervescence musicale à Paris mais je pense que celle-ci ne vient pas forcément que de la musique, mais plutôt d’un renouvellement générationnel. Depuis quelques années, le marketing inonde notre quotidien, que ce soit dans la musique ou dans la grande consommation en générale. Les plus jeunes qui ont commencé leur vie avec ce schéma sociétal ont peut-être eu envie de s’orienter vers des choses plus subtiles, plus authentiques et se sont tournés vers des niches musicales moins évidentes, plus expérimentales. C’est gratifiant et excitant parce que ce vent nouveau amène un sang frais et que l’on assiste à une mutation du paysage électronique français. À nous maintenant de porter haut notre scène !

On t’a croisé dans la foule de Monumenta pendant la fête de la musique. L’Art contemporain t’intéresse ? Des projets de ce côté-là ?

FX : Même s’il s’agit d’Art moderne, je suis fasciné par l’univers de Pierre Soulages, son travail tout en texture qui mixe répétition et subtilité… Dans le domaine de l’Art contemporain, je voue un intérêt tout particulier à un ami, Luc Kheradmand, qui n’est autre que Voiski. Sa pièce “Atypical Computer Virus Collection” est un chef d’oeuvre !
J’ai quelques projets en cours avec mon amie qui est une artiste plasticienne. On me pose souvent la question si j’aimerais me produire sous le format d’un live. Et bien je crois que je préfèrerais plutôt me concentrer sur la création d’installations ou de performances.

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