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L’art de vieillir selon Damon Albarn

Quelques jours après sa sortie, revenons sur le nouveau disque de Damon Albarn, “Everyday Robots”.

Il est excessivement complexe, quand on a été une pop star durant sa vingtaine, de perdurer au delà des 35 ans. Regardez, par exemple, Oasis : les frérots Gallagher ne savent plus aujourd’hui rien faire sinon s’engueuler sur les réseaux sociaux avant de teaser l’éventualité d’une reformation. Le groupe qui leur faisait de la concurrence à la pointe de la Brit-Pop dans les 90’s, c’était Blur. Son leader, Damon Albarn, a mieux fini : il a monté Gorillaz, et a pris le temps de savoir parfaitement s’entourer. Il faut croire que pendant que certains piaillent, d’autres travaillent.

Cette histoire de vieillissement est particulièrement intéressante à l’écoute du nouvel album d’Albarn. Alors qu’il est monté au sommet de Blur à Gorillaz à travers des tubes aussi lumineux et charismatiques que “Girls and Boys” ou “Dare”, il semble depuis quelques années mieux s’assumer en tant que ‘vieux’. Attention, ne voyez pas par cette appellation une quelconque dévalorisation du personnage, bien au contraire : l’Anglais a compris qu’il ne pourra pas faire sauter les fosses de Zenith dans tous les sens toute sa vie.

Sur le dernier album de Gorillaz, il recrute deux ex-Clash, une multitude des MCs les plus classes du monde (Snoop Dog, Mos Def ou encore Mark E. Smith de The Fall) et se pose plus en retrait, comme un chef d’orchestre discret. Ce sera le début d’une mue qui aboutira à Everyday Robots, l’opus qu’il nous soumet aujourd’hui.

Ce nouveau disque frappe d’abord par son aspect follement intimiste. A aucun moment l’artiste ne tombe dans le piège d’un minimalisme guitare-voix : au contraire, tout est très mature, très arrangé, entre musique électronique, sonorités exotiques ou encore orchestrales, avec une obsession pour le piano qui nous rappellerait presque la démarche de Christophe.

Alors qu’il s’est attaqué à l’album de toutes les erreurs, celui où les artistes décident de faire un disque solo “près de l’os” pour finalement proposer des choses sous-produites ou des concept-albums ratés, il livre un auto-portrait touchant, sans ne jamais forcer sur l’émotivité pré-fabriquée pour travailler à faire simplement de beaux morceaux.

Everyday Robots sera donc justement son disque le plus humain, fruit de la douleur d’une collaboration avec le très dirigiste producteur Richard Russell, le boss du label XL Recordings (Adèle, White Stripes). En effet, c’est dans le combat salvateur entre le chanteur et le magnat de l’industrie musicale que l’ambiance du disque est apparue. Une bonne manière de rester alerte à un âge ou d’autres préfèrent profiter au calme de leur royalties.

Ainsi, c’est en fuyant la prétention mal placée, mais en conservant son exigence légendaire et son art du curating que Damon Albarn réussit à passer le très complexe cap de l’album solo. On vous conseille d’y jeter une oreille juste ici :