Jules Deba a commencé à travailler aux Bains avant la réouverture des portes en mars 2015, pendant la gestation du projet. Il a commencé en qualité de Chef barman et il est aujourd’hui Directeur de la restauration.
Villa Schweppes : Les Bains sont célèbres pour leur période des années 1980-90. Comment vous définiriez le lieu aujourd’hui ?
Jules Deba : L’établissement Les Bains d’aujourd’hui ne nous fait pas oublier ce qu’il s’est passé hier, bien au contraire, ça fait partie de l’ADN et de l’histoire ici. Aujourd’hui, la volonté de notre propriétaire, Jean-Pierre Marois, est aussi de se réinventer, d’où notamment l’aspect hôtelier totalement inexistant avant. Il s’agit d’un hôtel 5 étoiles dans lequel on trouve 39 chambres, sous étiquette de design hôtel et de boutique-hôtel. La partie restauration a été complètement repensée car, à l’époque des Bains, il y avait certes un restaurant sur le carré VIP, mais c’était plus un endroit de fête. Aujourd’hui, c’est l’esprit néo-brasserie chic qui a été développé avec un bar à cocktails.
Et le bar ?
JD : On est en marge de l’industrie puisqu’on n’essaie pas de faire des cocktails pour se faire plaisir à nous-même ou à nos confrères. On est dans un hôtel et, pour moi, quoi qu’il arrive, il faut donner satisfaction au client. On a beaucoup de créations mais on s’attache aussi à satisfaire les demandes les plus simples comme quelqu’un qui vient et qui, sans lire la carte, nous demande un Hemingway Daïquiri ou un quelconque classique. On est là pour le faire kiffer !
Quel est votre objectif premier ?
JD : Remplir notre mission d’hôtelier parce qu’on a beaucoup de clients d’hôtels. Ils voyagent beaucoup et je prends ça comme un défi : ils font d’autres bars d’hôtels à travers le monde et ils ont un ordre de comparaison, surtout s’ils boivent des classiques. L’objectif est aussi d’inventer en permanence avec un mot d’ordre : “Less is more”. On essaie de faire des créations sans tomber dans un truc incompréhensible pour le client. Enfin – et surtout – c’est un endroit de fête, de musique, d’artistes. Ça l’a toujours été.

Bar Les Bains

Bar Les Bains
Qu’est-ce qui fait votre particularité par rapport aux autres bars d’hôtel ?
JD : L’architecture est assez inédite pour un établissement parisien – elle a d’ailleurs été récompensée par des prix pour les établissements de restauration et hôtellerie – qui plus est dans ce quartier, parce que les 5 étoiles ne sont pas dans ce coin de Paris ! Tout a été restructuré, les volumes ont été repensés. Une partie s’effondrait, ce qui a bloqué les travaux. Jean-Pierre Marois en a profité pour faire une résidence d’artistes. On est un établissement international d’un point de vu clientèle et on a une grande variété de propositions : on peut y manger de manière semi-gastronomique ou sur le pouce, on peut venir bosser en journée et boire un jus healthy, venir le soir…
C’est pour tout le monde, en fait ! Je pense qu’on est relativement accessible, même si on propose des prix plus élevés par rapport au quartier. Mais quand on vient ici, on trouve de la musique quelle que soit l’heure, des brunchs, du yoga, du cinéma en plein air le dimanche soir, des soirées comme les 7 Salopards, des grosses soirées de lancement pour des marques prestigieuses comme Cartier, Dior, etc. C’est un endroit polymorphe qui n’arrête pas d’évoluer, qui reste en mouvement perpétuel. Voilà comment je définirais la chose.
Quelle est la particularité de la carte du bar ?
JD : On change très régulièrement la carte du bar, quatre à cinq fois par an. On essaie de toujours sourcer les produits de manière intelligente, de se démarquer, de ne pas prendre le train en marche de certaines modes et de trouver nous-même des innovations. Par exemple, une partie de la carte est consacrée aux “cocktails vieillis en fût” : très boisés, assez secs, ils vont s’adresser aux amateurs de spiritueux. Mais on a aussi du cocktail bord de plage, frozen, diamétralement opposé en termes de goût, de sucre, d’esprit. On tente de satisfaire tout le monde. Par exemple, sur une table de quatre personnes, on aime qu’il y ait quatre cocktails d’univers complètement différents. Un d’influence africaine, un plus japonisant, un autre très français, par exemple.
Je venais ici quand j’avais 17 ans, donc d’y travailler 20 ans après, c’est parfois étrange
Une anecdote à raconter ?
JD : Pour moi, la plus belle “anecdote”, c’est la soirée des 7 Salopards. On a fait un premier essai avec 7 DJ – d’où le nom – pour que chaque artiste se sente libre de jouer ce qu’il a envie. Pour ces soirées, l’agencement change : le mobilier est enlevé et on a un gros dance floor au milieu du bar. On en fait une par mois pour que ça reste spontané et accessible.
Je venais ici quand j’avais 17 ans donc d’y travailler 20 ans après c’est parfois étrange. Mais voir des DJs comme James d’NTM et Solo d’Assassin jouer ensemble, c’est tellement cool ! Et comme l’établissement est polymorphe, les gens qui finissent vers 2h30 ou 3h du matin, peuvent descendre au club et même dormir ici…
Il y a un lien entre la cuisine et le bar ?
JD : Oui, on a développé une carte de snaking qui s’accorde bien avec les cocktails. On ne peut pas parler de food pairing au sens pur du terme parce qu’on ne peut pas le faire dans un bar d’hôtel. Mais il y a un petit accord et on fait aussi évoluer ladite carte de snaking. On essaie de rester en vie et en mouvement en permanence.

Les cocktails

Les cocktails

Les cocktails
Un cocktail et un plat de la maison à recommander ?
JD : C’est difficile ! Moi j’ai une attache sentimentale aux cocktails vieillis en fût mais c’est personnel. J’aime beaucoup le “Spear Old Fashion” fait avec de super bons produits. Ce serait pour quelqu’un qui a des goûts de cow-boy, qui aime des choses un peu séchées. Sinon, dans nos best seller, il y en a deux que j’aime beaucoup : le “Eastern Wisnia” et le “Shimmy Shimmy Ya !”
Accompagné de quel finger food ?
JD : J’aime beaucoup le gravlax de saumon qui est légèrement épicé mais pas trop relevé et le poulpe mariné avec des copeaux de Serrano.
Il existe une vrai communication entre le bar et la cuisine. Les personnes en cuisine prennent du plaisir à nous regarder travailler parce qu’elles n’ont pas été habituées à voir des barmen faire leurs préparations. On fait évidemment tous nos sirops nous-mêmes, nos infusions également. La cuisine s’est prise au jeu, et on a par exemple un cocktail qu’on sert avec une sucette au vermouth et au piment d’Espelette. Une proposition de notre pâtissier. On lui a conseillé des vermouths, on lui a confectionné un sirop de grenadine maison et il a travaillé avec ça : et c’est parfait avec le cocktail à la tequila !
7 Rue du Bourg l’Abbé, 75003 ParisSite internet
L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTE. À CONSOMMER AVEC MODÉRATION.