Avant de devenir un des “espoirs” de la chanson française à synthé, Perez a joué dans le meilleur groupe de post-métal de France, et bien plus encore. Jekyll et Hyde.
Avant de faire des bluettes synthétiques potentiellement populaires, comme “Une Autre Fois” qui sort aujourd’hui, Perez a été l’un des fers de lance d’une scène qui se place à l’exact opposé : il chantait au sein d’un des plus gros groupes post-metal d’Europe, et bien plus encore.
Tâchons de retracer l’étrangeté de son parcours. Il faut retourner un peu plus de dix ans en arrière et partir à la recherche des morceaux d’un de ses premiers groupes, Metronome Charisma pour donner un point de départ à sa vraie carrière. Nous sommes en 2004, et les émos débarquent. Jeune homme, Julien Perez adore et fonce prendre le micro d’un groupe de screamo, sous genre de métal à mèche teinte. L’album du groupe est déjà nommé d’un très romantique (et très premier degré) “Notre Amour Est Assez Puissant Pour Détruire Ce Putain De Monde”. C’est puissant en live, certes, mais pas passionnant : le groupe se sépare en 2005.
Une partie des musiciens de Metronome Charisma forment un nouveau projet : Year of no Light. Julien est encore de la partie. Le ton est plus original, plus ambitieux. Ici aussi, la jolie voix que les jeunes filles aiment aujourd’hui chez lui sonne encore façon Grunt – cri métalleux. Le groupe va rapidement prendre de l’ampleur dans la scène des chevelus, mais ce ne sera qu’en se séparant de Perez qu’il pourra réellement exploser dans les nébuleuses du métal expérimental avec une musique dure mais brillante et tourner à flux tendu dans toute l’Europe. Pourtant, dans l’ombre, ce dernier s’était préparé un plan de secours.
Sûrement lassé des circuits alternatifs, ou tout du moins ceux des guitares sur-saturées, le Bordelais avait débuté le groupe électro-rock Adam Kesher en 2007. Le propos est ici bien plus pop, et la minette qui sommeille en chacun de nous sourira nettement plus aux appels sucrés de ce groupe que des précédents. C’est facile, la presse adore, les Disques Primeurs signent et le groupe sort son album au moment même du départ de Perez de Year Of No Light. Le groupe vit une belle explosion à la française, avant de se disloquer doucement au début des années 2010 face à la rigidité du cadre du groupe.
Ni une, ni deux, Perez embarque son guitariste et fonde Beat Mark. La masse suivra moins, mais ils signeront sur le prestigieux label garage américain Burger Records. Toujours en activité, ils jouent encore régulièrement dans des salles comme l’Espace B à Paris. Mais le chanteur, sûrement en voyant les limites du projet, se lance seul et suit la vague francophone avec 2 ans de retard mais un appétit certain. Après quelques singles, voici que le garçon nous tease son album avec “Une Autre Fois”. Ce n’est ni plus ni moins qu’une chanson d’amour à synthé en français comme en font tant d’autres. C’est la mémoire de ses différents projets antérieurs, particulièrement les premiers, qui donne finalement un grain tout particulier à cette track.
On ne comprend d’ailleurs pas la maison de disque : pourquoi tenter de passer sous silence le passé tumultueux du musicien, alors que ce sont les aspérités de son parcours qui lui donnent tout son charme ? Son évolution dans des sphères bien plus passionnantes que celles dans lesquelles il exerce actuellement ne lui donnent-elle pas une force romantique certaine ? Quand il chante : “On aura tout le temps, tout le temps, tout le temps, une autre foiiiiis“… Est-ce ce qu’il a pensé quand il quittait un underground pour un autre ?
Quoi qu’il en soit, saluons le talent de cette anguille des scènes indépendantes françaises et souhaitons lui d’atteindre enfin le succès dont il semble rêver depuis si longtemps.