Existe-t-il une nouvelle vague de réalisateurs de clips à la française ? De plus en plus nombreux et récompensés, ces frenchies sont autant sollicités en France qu’à l’étranger. Tour d’horizon.
La nuit de dimanche a célébré la french touch vidéo. Grammy Awards 2015, une pluie de récompenses musicales aux États-Unis et deux Français sur le podium côté clip : Clément Durou et Pierre Dupaquier. Leur duo s’appelle We Are From LA mais pourtant, ces deux-là sont bien de notre contrée et ils enchaînent les succès en tant que réalisateurs vidéastes.
Après le puissant “Power” de Kanye West en 2010, le très travaillé “La musique” pour Yelle sous forme de collages la même année, hier soir le duo de créateurs a été récompensé pour le clip “Happy” de Pharrell Williams – rien que ça ! Et cette statuette ne fait qu’écho à une tendance déjà bien amorcée, celle de clippeurs à la française, telle une nouvelle vague s’abattant sur nos plates-formes vidéos et autres supports les accueillant. Autre exemple récent, les Français Fleur & Manu et ledernier clip de Skrillex…
L’originalité des Français
Jonas & François, un autre duo à l’origine du clip D.A.N.C.E de Justice a marqué les esprits en 2007. Les demandes n’ont pas cessé depuis la diffusion de cette vidéo, de Kanye West – encore lui – à Madonna, Flairs, Depeche Mode ou bien Iggy Azalea. Leur force ? Utiliser toute forme et toute idée originale sans avoir peur de la technique, du défi dans la réalisation. A la fois pop, arty, coloré, leurs clips se voient comme des courts métrages qui racontent à chaque fois une histoire, non sans graphisme et qui nous embarquent dans un univers technicolor et propre à une french touch par l’image.
Un mix de genres musicaux
L’autre grande force des clippeurs français, c’est leur capacité à mélanger des réalisations très grand public à des créations plus personnelles, plus intimistes. C’est le cas très récent de J.A.C.K, Julien Choquart et Camille Hirigoyen pour les noms civils, un duo déjà très haut placé dans le rang des clippeurs à succès. Ils viennent de dévoiler leur clip réalisé pour Madonna, “Living for love”. C’est aussi eux derrière le clip très apprécié de Christine and the Queens, “Saint Claude”, un esprit “danse” et une chorégraphie maîtrisée au millimètre près qui s’avère être une marque de fabrique.
Dans un autre registre, plus péotique et plus proche du rêve, Benjamin Kühn a la côte. Il vient de signer la réalisation du clip “Ocean” de Kid Wise, une véritable échappée lyrique et sauvage parsemée d’ombres et de nature. Il est aussi à l’origine de la vidéo “A l’aube”, nouveau titre du groupe Feu!Chatterton, là encore dans un tourbillon poétique en noir & blanc, fait de nature, de marche et d’histoire embuée.
La petite interview d’un duo à suivre : Truman & Cooper
Anthony Jorge et Jonathan Cohen se sont unis à l’image pour nous offrir des vidéos clips d’une beauté imparable. Parmi les plus réussies, on peut citer “Alternate World” de Son Lux et le très romancé “Hope” de Kid Wise.
VillaSchweppes : Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire des clips, de vous lancer dans l’aventure Truman & Cooper ?
AJ et JC : Ça fait dix ans que l’on fait des films pour s’amuser avec Jonathan (aka Cooper). On faisait vraiment ça instinctivement, pour expérimenter des trucs et puis surtout pour se marrer. Truman & Cooper est arrivé au moment où on s’est dit qu’il était peut être temps d’en faire quelque chose de plus approfondi. On s’est retrouvé assez naturellement à faire des clips, déjà parce qu’on s’intéresse de près à la musique (on a commencé par faire de la musique ensemble avant de faire des films) et surtout parce que c’est le plus beau terrain d’expérimentation que l’on ait trouvé.
VillaSchweppes : Quelle est la touche Truman & Cooper ? Comment pourriez-vous décrire en quelques lignes votre travail ?
AJ et JC : Ce qu’on fait, c’est simplement raconter des histoires, des sentiments. On cherche des manières originales et personnelles de le faire, à travers des personnages qu’on veut forts et sincères, assez pour toucher les gens. C’est l’émotion qu’une histoire peut susciter, qu’un personnage peut transmettre qui nous intéresse!
VillaSchweppes : Est-ce que le fait d’être français est un avantage, est-ce que ça vous apporte une identité sachant que de nombreux artistes internationaux font appel à des clippeurs français depuis quelques mois ? En gros, est-ce qu’il existe une french touch façon clip ?
AJ et JC : Je n’ai pas l’impression que l’on ait encore vraiment profité du fait d’être français mais c’est vrai que ça nous arrive de le sentir autour de nous. Madonna qui vient voir les JACK pour leur dire “J’aime bien le clip pour Christine là, vous venez à New York tourner le mien le mois prochain” en est un bon exemple ! Et c’est aussi vrai qu’à Londres, on sent qu’il y a un certain fantasme autour des français. En France on nous dit que nos films sont géniaux parce qu’ils ont l’air anglais et à Londres on nous dit que c’est cool parce que des Anglais ne feraient jamais des films comme ça…OK… En tout cas, je fais bien attention à garder mon accent français, ça m’aidera, je le sais.
VillaSchweppes : Pensez-vous que l’on peut parler d’une nouvelle vague de clippeurs à la française ?
AJ et JC : J’ai bien vu la grosse grosse vague, Mega Force, We Are From LA, ABCDCD, Yoann Lemoine… C’est limite raz de marée. Ça a clairement ouvert des portes. Maintenant, il faut faire encore mieux ou différent pour créer une nouvelle vague et continuer sur la lancée. C’est assez stimulant!