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Cabinet de Curiosité #3 : où est le chelou ces temps-ci ?

L’inédit, l’innovant, l’avant-garde voire le bizarre, voilà ce qu’aime à collectionner le Cabinet De Curiosité, cette pêche à l’étrange et au merveilleux dans les flux sonores de l’Internet.

Hyeroglyphic Being, clochard céleste de la techno

Jamal Moss remixe Hans Joachim Roedelius. Jamal Moss remixe Hans Joachim Roedelius et ça excite à peu près autant les foules qu’une convention de philatélistes au sud-Soudan. Néanmoins, le premier, connu en tant que Hyeroglyphic Being est un de ces vagabonds magnifiques de la techno – les mains du free jazz pilotant des machines – comme le genre en connait trop peu. Le second, quant à lui, fit connaitre au rock allemand ses hauteurs les plus cosmiques en fondant Cluster. On vous épargne la fiche wiki mais le côté solaire du Sun Ra de la techno n’a jamais brillé aussi fort, c’est lumineux à nous en faire plisser les yeux et tumultueux à s’en coller des maux de mers.

 

Leyland Kirby, paysages sonores et gueules de bois

Chez Leyland Kirby, la crise de la quarantaine ne se manifeste pas par l’achat d’une voiture de sport ou l’envie de tout plaquer pour les beaux yeux de Sandra de la compta. Non. Leyland est du genre à pondre un album de quarante titres, imbibé aux bourbons solitaires des événements qu’il vaut mieux oublier. Ainsi, Kirby dilue ses quarante ans dans quarante titres de brumes nauséeuses tentant de détendre le temps avant la date fatidique. Une production à la lumière vacillante et falote, une morgue typique de ce qu’il élabore depuis bientôt vingt ans en tant que V/Vm – et ses papiers-peints sonores décatis, fous et farceurs – ou en dessinateur d’un brouillard électrique sous le masque de The Caretaker. Ça s’appelle très justement We Drink to Forget the Coming Storm, il y a du Lynch dans l’espace-temps, l’album est gratuit pendant quarante nuits et quarante jours mais vous pouvez (selon ses dires) lui offrir ” de quoi se payer un whisky ” si vous voulez acheter l’album.

Sortie le 9 mai.

François X, minimale au pied de la lettre

Une couture entre le travail sur le son, les événements de la vie, la décadence des temps préents, la société, la science-fiction et des rituels voodoo et tribaux, délivrant des moments puissants de musique brute et téméraire“. Voilà comment le jeune label DEMENT3D vend son poulain et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’y a pas d’excès de corporatisme. C’est-à-dire que ce premier EP vient clôturer une longue série de strikes chez François où on l’a notamment vu remixer ses camarades de label et newcomers qu’il coudoie à l’école des promesses de la techno d’en France : Polar Inertia. Une techno de sorciers, touchant le corps par l’envoutement, au kick aride et au charbon brulant dans les veines.

Sortie le 28 avril chez DEMENT3D.

Moiré, rayon rayée de la techno

Stylistiquement, le moirée c’est un “effet de contraste changeant avec la déformation d’un objet, indépendamment des effets d’ombre” (merci l’Internet). Imaginez maintenant qu’un producteur anglais avec tout l’héritage bass, son corps, son jus, traduise l’idée en techno, vous obtiendrez Moiré, une des énigmes du genre. Avec pareil point d’interrogation en guise de visage, nul étonnement ne nous prend lorsque l’on apprend qu’il a signé chez Werkdiscs, maison des mystères en électronique dirigé par le non moins mystérieux Actress. Résultat ? Une techno nébuleuse jouant sur les contrastes, sur l’espace et les profondeurs, tout en mouvement et en lévitation statique. Un mindfuck magnifique

Moiré – BBOY 202 from Werkdiscs on Vimeo.

Sortie le 2 juin chez Werkdiscs/Ninja Tune.

 

C L N K, l’autre techno de Roumanie

Bucarest. À quelques encablures du littoral, un producteur Roumain élabore une électronique à l’image de leur mer : noire. Et trouble. Silviu Badea n’est pas du serail local de la techno, et s’est construit en parallèle des Cosmin TRG ou Arpiar. C L N K, c’est une autre Roumanie de l’électronique, rugueuse, éclatante, éclatée, à tête chercheuse et avec de grandes respirations venues du savoir-faire cinématographique. Ses soundscapes n’ont que la peau sur les os et elle frissonne. C L N K ne cherche pas à vous faire danser, il cherche tout court.

Signé chez Error Broadcast – ce qui est plutôt très bon signe – le dernier EP de C L N K, ANTI, est sorti le 12 mai dernier.

 

Mike Weis, guérison par le son

Outre l’aspect purement esthétique, il y a quelque chose de profondément touchant dans cette oeuvre de Mike Weis. Réalisée lorsqu’il apprit qu’il était atteint d’une maladie grave, Mike chercha une porte de sortie depuis la réalité creusée via son oeuvre. Multi-percussionniste de génie, Weis ouvrit un vortex avec ses instruments pour rejoindre un univers mystérieux, gigantesque et aussi inquiétant que protecteur. C’est contemplatif, et pour cause, c’est inspiré de la méditation bouddhiste, chose qui l’a aiguillé aussi dans son approche de la musique : “je pensais que ma musique me permettait de m’échapper de la réalité, elle me permet en fait de m’échapper dans la réalité” explique Mike.

Disponible librement à l’écoute, Don’t Know, Just Walk sera disponible le 13 juin chez Type.

Benedict Cumberbatch te raconte une histoire

Ça autrement plus de gueule que Père Castor et Marlène Jobert réunis. Benedict Cumberbatch – autrement dit le Sherlock de la série Sherlock – vous raconte une petite histoire de sa voix glabre et grave. Ça n’est qu’un court extrait enregistré à l’occasion du Late Night Tales (célèbre série de compilations élaborées par des huiles de l’indé à titre somnifère) de Django Django. C’est soporifique et pas loin du terrifiant. C’est soporifiant.

Père Bene te raconte une histoire ici.