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Sophie, Barbie Girl de l’UK house

En moins d’un EP, Sophie est déjà aussi haï qu’adulé et s’apprête à bosser avec Kyary Pamyu Pamyu. Retour sur l’éclosion du cygne noir fluo de l’électronique.

Cela fait un an maintenant qu’un weirdo couvert du masque d’une certaine Sophie excite les foules. La presse y voit (avec son label PC Music) le futur de l’électronique et la part du public qui ne matraque pas la touche repeat, le déteste. Oui LE déteste. Sophie est un homme. Un petit rouquin, la vingtaine, toujours anonyme. Et si Sophie tranche autant les avis, c’est que son esthétique, quant à elle, tranche dans le vif.

Car si Sophie signifie sagesse (microseconde wiki), le projet est tout sauf raisonnable. Bien au contraire, le londonien cultive l’excès. Excès de pimpant, de mauvais goût, de mignon/kawaï… C’est d’ailleurs ce dernier point qui rend Sophie aussi contagieux. Le mignon. Point de suture entre l’avant-garde et le grand mainstream, c’est par lui que Sophie attire le regard et séduit. Un mignon à pondérer puisque l’entreprise va plus loin que du lolcat et se sert de sa naïveté pour véhiculer son lot d’ambigüité.

En premier lieu, Sophie connait le mainstream. Comme les gros hits constellant les charts (on ne parle pas ici de Kanye ou Beyoncé qui savent écrire une chanson), Sophie s’attaque à la pop avec un dédain pour la pop : on y retrouve le hook mais le songwritting revenu à son plus simple appareil cherche à employer une mécanique régressive. C’est limpide, lisible donc un véhicule idéal pour percuter massivement. Pour arriver à ses fins, il est revenu à un temps où les singles s’écoulaient en compact discs et cultive une nostalgie des 90’s fantasmées. C’est ainsi que l’on retrouve chez lui cette dance bubblegum que l’on pensait enterrée avec Aqua. C’est aussi d’ici qu’il tire cette innocence feinte, cette joie forcée et ces voix d’écolière hyper pitchée annonçant qu’elle peut “te faire aller mieux“. Ici le mignon s’étire jusqu’à la gêne et l’overdose.

Mignon jusqu’à la gêne ? Ça ne vous évoque rien ? Sans mal Sophie colle à l’esthétique cupcake, émoticon et chaton de la J-pop. Avec un sex appeal en plastique de poupée bouche bée, rien d’étonnant à ce qu’il collabore aux oeuvres de Kyary Pamyu Pamyu, la fiancée du Japon, la star du genre, une baby doll affectionnées des pré-ados comme des quadras japonais, males et esseulés. Encore une fois : mignon jusqu’au malaise. Un sous-texte sexuel très ambigu associé à une couleur musicale nauséeuse que Sophie fait dégueuler dans le grime et le garage de Londres.

Acide, artificiellement sucré, sur-caféiné, une belle dose de mauvais goût, Sophie est la boisson énergisante de l’électronique moderne. Et histoire de prendre bonne mesure du phénomène, notons que Sophie et A.G Cook, le patron de son label PC Music forment QT, projet signé chez XL Recordings, la maison d’Adèle ou Radiohead. Sans sortir de boule de cristal et jouer au bohémien, de toute évidence, l’électronique est en train de s’écrire un nouveau paragraphe avec de la gêne dans l’ADN.