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Seventeen At This Time : le court-métrage “Angel”, 12 minutes d’anti-marketing

Il n’en est plus à son coup d’essai : le groupe Seventeen At This Time continue de travailler loin des schémas marketing. Aujourd’hui, il nous explique le court métrage qu’il vient de sortir en guise de clip.

Il existe plusieurs formes d’indépendance d’esprit, plusieurs façons de l’aborder. Mais le groupe qui nous intéresse aujourd’hui en a fait un véritable leitmotiv : les membres de Seventeen At This Time font ce qu’ils veulent, comme ils le veulent et sans se soucier de la réception de leurs productions. Ils font partie de ces trop rares artistes qui n’ont cure ni de la temporalité ni des impératifs promotionnels.

La dernière illustration en date est la sortie en début de semaine d’un court métrage d’une dizaine de minutes pour illustrer le morceau “Angel”, issu de leur album Tokkoubana sorti il y a déjà… un an. Question plan de com’, on a vu mieux. Plus encore, balancer cette vidéo de 12 minutes pour illustrer un morceau de 4, dans une époque d’immédiateté numérique comme la nôtre, qui plus est lors d’un mois de vacances, est carrément un suicide promotionnel.

Des pom pom boys et un fil d’Ariane

Mais il faut savoir laisser le temps au temps, surtout face à des esthètes comme les membres du groupe : on imagine que réaliser une vidéo de cette qualité, avec les budgets que l’indie peut connaître (0€), peut être très long. Et Seventeen At This Time n’est pas du genre à s’arranger avec les mieux et les à peu près. C’est ce qui les avait placé dans notre sélection des disques les plus marquants de 2013.

En 2014, mettre l’humain – l’empressement, l’impatience et la recherche légitime de reconnaissance – de côté au service de l’oeuvre est le plus beau cadeau que puisse faire un groupe. Refuser de servir de l’approximatif à fin promotionnelle pour se concentrer sur le fait d’emmener un objet et son concept au bout de leurs potentiels est une véritable marque de respect adressée aux fans.

Suivre le fil de projets plus ou moins fous, comme réinventer une bande son pour Flaming Creatures, un film expérimental de 1963 et en préparer une sortie physique un an plus tard, est le mode de fonctionnement qui sied le mieux au groupe. Quitte à prendre le risque de rester au fond des souterrains pour le reste de leurs jours.

Revenons au pitch: 4 jeunes gens se lancent dans un club de pom pom boys, avec un entraîneur plutôt martial. Posez vos fesses confortablement, assurez vous de ne pas être dérangé dans les douze prochaines minutes, et regardez cette video. Vous y croiserez d’ailleurs les Dead Mantra, qui avait représenté Le Mans dans notre rubrique “Local Heroes”.

On a posé quelques questions à Fred Engel Lenoir, “leader” du trio, pour qu’il nous explique sa démarche :

Y a-t-il une démarche de “résistance” à travers cette vidéo, à travers sa durée ou le fait que le morceau soit majoritairement placé au générique ? Est-ce le manifeste d’une rupture avec le “monde de la musique” professionnel ?

Fred Engel Lenoir: Résistance ? C’est un peu romantique et exagéré, non ? Oui, nous rompons avec une démarche de vente au profit d’une démarche narrative mais nous rompons surtout avec un procédé qui nous ennuie au profit d’un procédé qui nous amuse. Faire un film comme Angel – ou un disque comme Tokkoubana – c’est avant tout faire quelque chose qui nous intéresse, qui nous séduit. Et ce qu’en pense le “monde de la musique”, ça le regarde.

Comment a émergé l’idée de cette vidéo?

C’est un prolongement de l’instant où, dans la vidéo d’ “Everything I Touch Goes Wrong” la musique se tait complètement et on n’entend plus que le hurlement de François (Delaive, l’acteur des deux clips du groupe, Ndlr). Avec Alexis (Chérigny, le realisateur, ndlr), on a eu envie de prolonger ça. Et de plonger notre personnage dans un autre contexte.

François Delaive joue justement encore dans cette vidéo. Est-il en train de devenir le visage de Seventeen At This Time ?

François est un acteur brillant et un homme intègre, un ami de longue date que j’aime comme un frère. S’il veut être notre visage, ça me va parfaitement.

Il y a de nombreux messages sous-jacents, les pom pom boys, l’entraînement “martial”, etc… N’est-on pas plus dans un cinéma symbolique plus que dans le cinéma du réel, finalement ?

Effectivement, on est dans un cinéma symbolique, on est dans l’évocation. On emprunte au réel pour aller “ailleurs”. C’est, je crois, LE trait d’union entre la musique de Seventeen at this Time et le cinéma d’Alexis Chérigny.

Cette vidéo, celle de “Everything I Touch Goes Wrong”, le projet Flaming Creatures … La musique de Seventeen At This Time a toujours été très liée à l’image. Concevoir un long métrage qui vous serait propre, ne serait-ce pas finalement l’aboutissement du groupe ?

Vu que les mots “Seventeen At This Time” sont intimement liés à une séquence de film (Les Ailes du Desir, Wim Wenders, ndlr), je suppose que ce serait comme de boucler la boucle. Toute la musique pop est liée à l’image. Toutes les chansons sont aussi des histoires. On ne fait pas autre chose que raconter le monde tel qu’on le perçoit. Quant à concrétiser cette démarche sous forme de long-métrage, bien sûr ça nous intéresserait. Des choses sont peut être déjà à l’oeuvre dans l’ombre – qui sait ? – et si un jour ça se produit par surprise, vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous avait pas prévenus.