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Raw Club Material la nouvelle compile de Sound Pellegrino expliquée par Teki Latex

Entre deux bouchées de côte de boeuf, le fondateur de Sound Pellegrino Teki Latex, nous parle de la nouvelle et troisième compilation du label.

Après avoir fait trembler la sphère Internet avec son mix sur trois platines lors de l’émission Overdrive Infinity du 29 mai, Teki Latex nous invite à le rejoindre autour d’un bon petit plat pour nous parler nouvelle compile, musique et “tool”.


Teki Latex – Overdrive Infinity #28 (Part 2) par OverdriveInfinity

Rendez-vous à Paris au croisement de la rue des Ecouffes et la rue des Rosiers. Il est 12h40 et on s’apprête à faire l’interview autour d’une pita au restaurant Miznon… La faim au ventre et la curiosité nous rendent impatients. Nous nous dirigeons donc vers le restaurant mais malheureusement celui-ci est fermé “Tant pis, nous irons chez Robert & Louise rue Vieille du Temple” propose Teki Latex. Bien, c’est parti pour une petite marche courte mais intéressante dans les rues du Marais.

Nous voilà arrivés et après un temps de discussion, il est temps d’attaquer ce pourquoi on est là : la sortie de la compilation Sound Pellegrino. Raw Club Material ainsi que la sublime côte de boeuf qui se tient fièrement devant nous.

est une figure emblématique de la scène électronique française, détenteur d’une carrière musicale d’une quinzaine d’années avec des projets variés tels qu’un groupe de rap, une émission de podcasts télévisés, il est aussi producteur et directeur de label.


1/ Quelle est la différence entre cette compile et les précédentes ?

Teki Latex : La première était une présentation globale du label. On y retrouvait des habitués comme Matthias Zimmermann, Sound Pellegrino Thermal Team, Modeselektor ainsi que des collaborations inédites et inattendues du genre Jean Nipon et Koyote. On y avait aussi lancé le premier morceau de Joe Howe. Il y avait l’élément crossover series qui était présent avec des artistes comme Maelstrom et Djedjotronic, et des artistes comme Crystal et K-Lagane. Cette compile représentait un peu le paysage passé – présent – futur de Sound Pellegrino.

La deuxième était exclusivement consacrée aux crossover series : on prend deux artistes d’univers différents d’un point de vue géographique, musical ou encore
générationnel et on les réunit et on voit ce que ça donne. Ce concept a bien sûr d’abord été développé sur des maxis (comme celui de Joakim et Bambounou) et décliné par la suite sur une compile. On est très fiers d’avoir monté un son entre Crystal et Ikonika car on a réussi à capter une relation musicale qui n’était pas évidente. Idem avec la collaboration entre TWR et Truncate qui, sans le savoir, étaient tous les deux fans l’un de l’autre.

Sound Pellegrino est un label où la culture club intervient à un moment ou un autre, c’est d’ailleurs l’une de nos caractéristiques même si parfois le côté club n’est pas toujours évident

La nouvelle et troisième compile qui sort le 16 juin est centrée sur un thème et des morceaux beaucoup plus clubs que sur les précédentes. Sound Pellegrino est un label où globalement la culture club intervient à un moment ou un autre, c’est d’ailleurs l’une de nos caractéristique même si parfois le côté club n’est pas toujours évident. Cette compile est beaucoup plus frontale et elle met en avant des découvertes notamment Rushmore et Toyc qui sont deux petits producteurs anglais vraiment talentueux…

2/ Raw Club Material, une compile plus brute, plus club du coup… Pourquoi cette volonté de se touner vers ce genre de productions ?

C’est tout simplement ce que l’on joue de plus en plus dans nos sets. Que se soit Orgasmic et moi (Sound Pellegrino Thermal Team) lorsque l’on joue ensemble, moi tout seul ou encore Orgasmic tout seul, on a pris l’habitude de jouer avec trois platines. On joue donc sur des superpositions dans nos sets ainsi que sur des reconstructions et déconstructions de morceaux, des morceaux un peu squelettiques qu’on va assembler. Il est intéressant pour nous d’avoir un bons stocks de “tool” (ndlr : les outils de retouche son, les samples etc) qu’on va pouvoir assembler et qui vont nous donner des morceaux avec de l’espace, des morceaux un peu minimalistes. Il est important pour nous d’avoir ça et c’est ce qu’on aime dans la musique électronique.

Parallèlement à ça, on avait aussi envie de pousser des nouveaux artistes : à part Matthias Zimmermann et deux trois noms de la compile, on a surtout balancé de nouveaux mecs !

Il y a une espèce de fusion entre toutes les musiques de club qui ont pour point commun un aspect futuriste, un aspect tool et une gestion de l’espace bien particulière

Depuis les débuts de Sound Pellegrino, à l’époque où on sortait surtout de la House “Tropicale” une de nos premières sorties était quand même “Compass” de L-Vis 1990, on a toujours eu un pied dans ce genre de son et de scène ne serait-ce qu’avec des maxis comme celui de Teeth ou celui de Bok Bok et Tom Trago. On a toujours eu une relation avec la scène bass anglaise très forte. On est de grands fans de ça même si à l’époque on y injectait un truc plus house et qu’aujourd’hui on y injecte un truc plus techno. On s’est intéressés à l’héritage de la musique anglaise en zappant un peu le dubstep. A côté de ça, on a toujours été des gros fans de Grime (j’avais d’ailleurs co-organisé la première soirée Grime à Paris avec l’un des membres de Radioclit). La soirée s’appelait “Poulet et Bière” et se déroulait à l’époque au Triptyque). Du coup, c’est assez naturel qu’aujourd’hui on s’intéresse à des artistes comme Rabit ou encore Toyc et Rushmore. Le morceau de Nicolas Malinowsky présent sur la compile est très grime aussi donc on renoue vraiment avec cette scène là qui elle aussi de toute manière s’acoquine avec des scènes comme ballroom et la techno de nos jours… Il y a une espèce de fusion entre toutes les musiques de club qui ont pour point commun un aspect futuriste, un aspect tool et une gestion de l’espace bien particulière. Tout ça ça nous excite beaucoup et on a donc décidé d’y revenir. C’est l’une des clefs pour expliquer la direction de la compilation ; même si cette direction est très très large. Le morceau de Koyote par exemple, est un morceau plus techno même si il est assez mélodieux et que ce ‘est pas un drumtrack.

3/ Le label anglais Night Slugs avait fait quelques Club Construction qui étaient dans le même état d’esprit que les compiles Sound Pe. Est-ce que votre but est d’amener une touche “Night Slugs” en France ?

Ce n’est pas mon but mais c’est un label cousin. On a sorti l’un des premiers maxis de L-Vis 1990. Je pense qu’ils ont une identité très marquée et c’est surtout un label familial, une sorte de crew qui se concentre sur le peu d’artistes de leur bande. Ils se permettent une fois de temps en temps de faire une incartade mais globalement c’est quand même un label de groupe. Alors que Sound Pellegrino que se soit lorsqu’on fait des compilations ou lorsque l’on sort des maxis, y a une sorte de noyau dur certes, mais il y a quand même beaucoup de gens de l’extérieur. On a cette volonté d’être comme un magazine musical qui va évoluer avec les goûts de ses éditorialistes qui sont Orgasmic et moi.

Amener un son Night Slugs à la française se serait ne voir qu’une seule partie de Sound Pellegrino. Mais cela dit on est très influencés par le côté Club Construction et effectivement cette compilation s’inscrit dans cette veine. Je pense qu’on fait partie d’une nouvelle école où l’influence est mutuelle : en ce moment par exemple le label Fade To Mind, le label sister de Night Slugs qui a la même direction artistique, vient de sortir une nouvelle ligne de maxis qui s’appelle Mind To Mind et qui ressemble fortement à nos crossover series. Plutôt que de faire du Night Slugs on préfère inviter les mecs de Night Slugs à faire des trucs chez nous.

4/ Le Curating est un peu une tradition sur les labels électroniques. Comment l’expliquez-vous ?

Faire des maxis est un bon entrainement pour les labels c’est ce qui garde de l’huile dans le moteur mais si tu veux vraiment attirer l’attention de la presse, si tu veux faire un “statement” et donner quelque chose aux gens de plus consistant auquel ils vont pouvoir s’attacher sur un long format et un truc qui ne concerne pas que les DJ’s, il faut que tu fasses soit un album soit une compilation….

L’album de Matthias Zimmermann va enfin sortir donc développer un artiste ça prend du temps : il est fait à 90% il manque des petites choses et quelques featurings pour vraiment pouvoir l’amener à un level supérieur. En attendant, il fallait sortir quelque chose afin que l’on continue de parler de Sound Pellegrino et on a trouvé la compile. Ces actus, nous on permis de faire des couvertures de magazine, on a eu aussi deux Boiler Room, et c’est ce qui fait qu’on a eu de l’attention. Lorsque l’on a commencé les compilations, le projet a pris une ampleur différente. On sent que les choses sont plus faciles à obtenir et on a moins besoin d’expliquer qui nous sommes.

5/ Si on s’en réfère à la première compilation Sound Pellegrino, on peut nettement voir une évolution. Au départ on avait des artistes tels que Modeselektor, Orgasmic, Jérome LOL, Surkin… et dorénavant, on se retrouve avec des artistes pour la plupart inconnus du “grand public”. D’où vous est venue l’idée de mettre ces jeunes du monde entier en avant ?

On avait mis le paquet sur les noms établis lors de la première compile et on voulait tout simplement changer. Il va dorénavant y avoir deux compiles par an. Il faut savoir qu’il y a plusieurs mouvements dans Sound Pellegrino : récemment on a sorti Track ID et Deke Soto, très très tool et très très techno/bass… J’ai personnellement le sentiment que c’est de la techno mais quand j’en parle j’entends “t’es fou c’est pas du tout ça” (rires). Mais moi dans mon esprit tordu Track ID c’est de la techno…

En ce moment, Sound Pellegrino est coupé en deux identités sonores qui se côtoient. Une branche va être un peu plus tool avec des mecs comme Track ID ou une de nos jeunes signatures venue de Strasbourg, Friendship et une autre un peu plus funk digitale et pop naïve dans le genre Crystal, Joe Howe, ou Matthias Zimmermann.

6/ Faites-vous partie des boss de labels qui sont plus connus que leurs artistes?

Je n’ai pas été qu’un patron de label : j’ai été artiste, j’ai été dans un groupe TTC, je m’occupe d’une émission de TV (Overdrive Infinity) donc j’aime faire découvrir de la musique aux gens mais j’assume mon rôle de leader ! Je ne suis pas là pour me mettre en avant plus que mes artistes mais ma “longévité dans le game” fait que j’ai une certaine assise que je mets au service de mes artistes. J’ai eu 15 carrières ! J’ai fait un album pop avec Gonzales, j’ai fait trois albums de rap avec TTC, j’ai été signé sur un label anglais et sur des majors, j’ai été journaliste et tout ça je le mets au service des artistes que je signe : le savoir est fait pour être partagé et l’expérience aussi.

Si notoriété il y a je la mets au service des gens avec qui je travaille!

Mais ça se discute aussi car je n’ai pas l’impression d’être le mec le plus médiatisé de la musique électronique. Tu traînes aussi les bagages de Teki Latex quand tu signes chez Sound Pellegrino je pense.

7/ 13 titres… Vous n’êtes pas superstitieux ?

13 c’est pas mal comme chiffre : 10 tu restes un peu sur ta fin, si t’en a trop c’est bourratif. On commence à demander des titres à des gens, et au fur et à mesure de ce qu’on les reçoit cela commence prendre forme : du coup on se dit “ah bah tiens tel mec ça collerait bien avec celui-là etc“. C’est comme ça que ça se fabrique une compile : un artiste avait promis un morceau et finalement il n’a pas eu le temps, une autre t’envoie un truc au dernier moment qu’est chanmé et tu te dis “bah vas-y on le prend” et au bout d’un moment tu as tes titres. Ça aurait pu en faire 14, ça aurait pu en faire 12…

8/ Un titre coup de coeur sur cette compile ?

Y en a un qu’on a beaucoup beaucoup joué Orgasmic et moi c’est “Phreak Mania” de Friendship. Ca fait un an qu’on le joue. Mais dès qu’on le joue tout le monde nous demande “qu’est ce que c’est ?!“. C’est un tool ghetto house de bonne facture, un morceau efficace et qui met tout le monde d’accord sur le dancefloor. Après il y a aussi le Deke Soto qui est très cher à mon coeur : il est tool dans l’esprit mais en fin de compte il n’est pas si facile à jouer que ça, il est pas droit quoi … Orgasmic avait le maxi sur Expect No Less mais j’ai tout de même tenu à le mettre sur la compile car je voulais le sauver, je pense que c’est un super morceau. Apres le Toyc je pense qu’il va méga faire parler de lui je sens que tout le monde va le jouer, le Ratchet Traxx je l’aime bien aussi… C’est dur de choisir.

9/ Pour finir, est-ce qu’il y a un artiste avec lequel vous rêveriez de travailler ?

J’ai été sur un morceau avec Cam’ron et même si je ne l’ai pas rencontré, je suis ‘dessus’ donc c’est déjà un artiste à cocher sur ma liste. Il y a des mecs que j’admire mais je ne me verrais pas bosser avec eux : par exemple mon Dieu dans la musique c’est Squarepusher mais je ne vois pas ce que je pourrais faire avec lui, je ne vois pas ce que je pourrais sortir de lui sur Sound Pellegrino ça n’aurait pas de sens et vocalement je ne vois pas ce que je pourrais lui apporter parce que sa musique est tellement parfaite… Non un mec avec qui j’aimerais vraiment bosser et qui est un autre de mes Dieux et on en parle et un jour ça va se faire ! Il s’agit de l’Allemand Error Smith, la moitié de MMM après j’adore Fiedel aussi et je serais très heureux de bosser avec lui (l’autre moitié de MMM) mais ouais en fait MMM ça tue. Les morceaux “Donna” et “Que barbaro” me rendent ouf… Error Smith a fait quand même un disque que je dois jouer sans mentir dans au moins 9 sets sur 10 que je fais… C’est toujours le même morceau et il est sorti en 2002. Mais genre depuis que je mixe de la house, dans 4 sets sur 5 ou 9 sets sur 10 j’ai dû jouer ce morceau qui s’appelle “Stiffneck”. Ça c’est fat. J’essaye de lui faire une crossover series mais je ne dirai pas avec qui car y a plusieurs option. Mon gout pour les tool vient d’Error Smith.

Quand Feadz me l’a fait découvrir en 2003 il m’a dit “tu vas voir c’est ouf, t’as l’impression que le son se décale et ça ne se décale pas et c’est hyper mouvant comme musique, tu ne sens pas la machine derrière c’est un truc super humain tout en restant robotique“. Y a toujours un truc un peu dissonant mais en fait ce n’est pas le cas…

J’ai l’impression que la house, la techno, la bass en fait c’est une partie de lego : tu prends un morceau tu le rajoutes à un autre morceau … et quand j’ai compris ça, le rôle de ces mecs là dans la musique moi ça change ma perspective sur le son.

Retrouvez Teki Latex et le label Sound Pellegrino au Sonar OFF le dimanche 15 juin ainsi, que sur la terrasse et dans les cales du Batofar lors de la Fête de la Musique dans le cadre du cinquième anniversaire du label avec : Orgasmic, Matthias Zimmermann, Joe Howe, 123MRK, Eero Johannes, Koyote, Nicolas Malinowsky, K-Laganne, Betty, AZF & Parfait, Friendship

Pour pré-commander la compile c’est par ici