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Interview : Club cheval passe aux choses sérieuses

Peu de temps avant la sortie de leur album “Discipline”, le groupe Club cheval a accepté de nous en dire plus sur ce qu’il considère comme l’album de la maturité. Rencontre avec Panteros666 et Sam Tiba, les deux attitrés aux interviews.

Si vous deviez décrire en 3 mots ce nouvel album, quels seraient-ils ?

Panteros666 : “Fragile” !
Sam Tiba : “Émotion” !
P : Non je préfère “Fragilité”. “Puissance”, aussi.
ST : Ouais, “Puissance”.
P : On dirait un peu une description de pneu pour l’instant, mais bon… “Fragilité”, “Puissance” et… (ils réfléchissent un moment tous les deux) “Texturé”. C’est horrible on dirait un Soulages (ils rigolent tous les deux).
ST : Allez, réfléchis !
P : “Lyrique” ? (Ils rigolent de nouveau tous les deux). Non, restons sur “Texturé”, c’est abstrait, c’est bien. De toute façon on n’a pas encore assez le recul pour résumer un truc qu’on a mis 4 ans à sortir. On le pourra dans 3 ans, je pense. C’est comme sortir d’un exam’ qui a duré super longtemps…

Il paraît qu’avec cet album vous “passez aux choses sérieuses” et vous lui avez même donné le nom de Discipline. Rassurez-nous, vous n’allez pas devenir chiants ?

P : Oui, on s’est forcés à devenir chiants sur certains trucs. On était comme des chercheurs dans un labo : on faisait nos petites expériences dans notre coin et, à un moment, on s’est dit : “Arrêtons de déconner et livrons le truc !” C’était comme avoir sa parution après des années de recherche.

ST : On s’est alors dit : “Disciplinons nos idées, disciplinons notre emploi du temps.”

P : “Disciplinons les styles qu’on explore, aussi”, parce qu’on aurait pu en explorer bien d’autres encore, faire d’autres choix artistiques. Chaque album sera un album concept avec des expérimentations stylistiques cohérentes et neuves.

Et donc, finalement, votre “directeur de recherche” était DJ Kore (leur producteur et accessoirement producteur de Booba, Rohff…). Un professeur qui n’a pas hésité à vous rappeler à l’ordre parfois…

ST : (rire) C’est exactement ça ! Lui, il fait vraiment du gros RnB super mainstream, super fat. Quand il a écouté nos démos il a dit : “Tu vois ces 20 secondes, votre morceau c’est ça !” Exactement comme aurait pu dire un directeur de recherche : “Il n’y a que le paragraphe 3 de la partie 4 qui est intéressant”. DJ Kore a réussi à mettre en valeur nos idées parce que, pour nous, elles avaient toutes la même valeur. C’était le communisme des idées, pour nous !

Comment vous l’avez rencontré ?

ST : On l’a rencontré en 2012 grâce à Jérémy Chatelain. On a tout de suite accroché !

Panteros666 : Ça fait déjà un an et demi qu’on bosse sur le 2ème album

Il a donc fallu 4 ans pour concrétiser cet album ?

ST : En réalité, il est prêt depuis un an et demi, déjà.

P : C’est ça de bosser avec une major, ça prend du temps ! Et puis on a retravaillé les morceaux, notre image, le live… Ça fait déjà un an et demi qu’on bosse sur le 2ème ! Le format album est super génial parce que tu livres une oeuvre hyper globale alors qu’on est dans une époque où tout va méga vite, les modes se font et se défont en 6 mois. Avec l’album, tu as quelque chose qui reste. Mais ça prend du temps, c’est lent. Alors, à côté, on aime bien l’idée de bosser sur des singles avec des collabs super cool pour profiter de cette instantanéité. On a plein de collabs avec des Ricains – des Ricains parce que ce sont eux les meilleurs en vocaux – qu’on aimerait faire. Être bon producteur et bon musicien, c’est aussi jouer avec les tendances du moment et créer tes propres codes.

Justement en parlant collab, vous avez fait appel à deux chanteurs : Rudy et Phlo Finister… On comprend votre volonté d’avoir une voix féminine (celle de Phlo Finister), mais pourquoi ne pas laisser Sam Tiba chanter sur vos compos, finalement ? Ce n’est pas quelque chose que tu aurais aimé faire Sam Tiba ?

ST : Je ne suis pas chanteur ! Je chante dans mes morceaux et j’adorerais chanter, mais j’aimerais aussi être joueur de basket professionnel ! (rire) Non, en l’occurrence ma voix, c’est un synthé. C’est-à-dire que je sais faire en sorte qu’elle sonne bien sur disque, mais je ne suis pas un chanteur. Je “chante” sur certains morceaux de l’album mais j’appelle plutôt ça de “l’utilisation de voix”.

P : De la synthèse vocale !

ST : Non mais j’adorerais ça quand même ! J’ai même failli prendre des cours de chant, mais je reste persuadé que ça reste un don inné.

P : Ouais, quand tu es un super chanteur, tes parents ont déjà une vidéo de toi à 6 ans en train de chanter hyper bien du Stevie Wonder ! Les cordes vocales sont comme un instrument : elles vibrent bien ou pas.

Donc le chant ça ne se travaillerait pas, en fait ?

ST : Oui bon je pense qu’on a tort mais c’est ce qu’on pense ! (rire)

P : Rudy, notre chanteur, c’est fou : dès qu’on l’a entendu, on a eu envie de faire un morceau avec lui !

ST : Tous les morceaux qu’on avait entendus de lui, c’était de l’auto-tune. On avait donc un peu peur de l’entendre “sec”, mais dès qu’il s’est mis à chanter a cappella on s’est dit : “Wow !” Mais Rudy est aussi une rencontre. Un chanteur même pas crédité sur l’album qui met sa voix au service comme un instrument. C’est pourtant compliqué avec les chanteurs Ricains qui s’attachent beaucoup à la démo, la première version. Lui, non : il nous a laissé une totale liberté et a d’ailleurs adoré le résultat !

Sam Tiba : Quand j’étais petit, au conservatoire, on me faisait jouer du trombone devant ma famille et tout le monde se foutait de moi

Sam Tiba, tu disais que ton but c’était que l’album plaise aux membres de ta famille lors de l’écoute du déjeuner dominical. C’est le cas, au final ?

ST : Je ne sais pas, ils ne l’ont pas encore écouté ! J’ai toujours été un peu traumatisé par les réunions de famille. Quand j’étais petit, au conservatoire, on me faisait jouer du trombone devant ma famille et tout le monde se foutait de moi.

P : Moi je faisais de la batterie !

ST : Ah tu vois ! (rire) Là, maintenant, quand ma famille écoute mes morceaux – ou même ceux de Panteros – elle ne comprend vraiment pas…

P : Il y a comme un fossé générationnel en France. Les Anglais ou les Allemands sont peut être plus ouverts musicalement.

ST : En Angleterre, on a de la bonne musique à la radio. Ici, en France, on a pas de contact avec la musique électronique.

P : Et puis, ici, j’ai l’impression que les adultes voient les jeunes comme les responsables de tous les problèmes, alors que ces jeunes se bougent tellement !

Vous allez le faire écouter à vos proches cet album, quand même ?

En choeur : Ah mais oui, bien sûr !

ST : Je pense que je vais l’offrir à ma mère qui va forcément l’adorer parce que je suis son fils, mais qui ne va pas aimer la musique en elle-même. Quoi que…

P : … Oui il y a certains morceaux qu’elle peut être susceptible de bien aimer.

Comme lesquels ?

P : “Other Guy”.

ST : Oui, “Other Guy” et le dernier morceau avec le bébé qui chante à la fin : “Dream On”. Tous les trucs avec les enfants, ça touche les vieux ! (rire)

Revenons à vos influences… Toi, Panteros666, tu es, paraît-il, la caution house et techno du groupe avec Myd. Cite nous le dernier titre house ou techno qui t’a plu.

P : Hugo Massien qui est signé sur XL (le label d’Adele, Prodigy, Jamie XX). Il s’agit d’un mec qui est issu d’une nouvelle scène en Angleterre qui s’appelle la deep tech, un mélange de rave de Manchester/ Leed du nord de l’Angleterre et d’une production HD de house d’aujourd’hui. Ça donne quelque chose de méga dark, hyper “hooligan” mais super dansant. Les gens dansent le shuffle dessus et moi j’adore danser comme ça !

ST : Ce qui est bien c’est que toute cette nouvelle vibe de la techno à ramener la danse dans le club et ça…

En choeur : Ça, c’est cool !

P : C’est bizarre de dire que j’aime danser. Ça fait mec qui a un boulot stressant et a besoin de se libérer le week-end. Le mec qui met du déo qui dure 24h et qui s’éclate. (rire)

Et toi Sam Tiba, ton truc avec Canblaster, c’est plus le hip-hop et le RnB. À ton tour de nous donner tes coups de coeur du moment.

ST : Kanye West ! Je m’en fout de ce qu’il dit sur internet. Au pire, ça me fait rire et je le trouve génial. Je trouve ça débile les gens qui s’offusquent pour ça… J’ai écouté son album et, c’est horrible la phrase que je vais dire, mais j’ai été touché profondément et ça m’a donné des idées de malade.
J’aime aussi beaucoup des valeurs sûres comme le dernier album de Jeremih.

En France, je citerais SCH, MHD, Jul… Sinon je suis un peu moins fan du dernier Booba mais je l’aimerai jusqu’à la fin de ma vie. Après, ce n’est pas aussi compartimenté chez Club cheval : tout ce que j’écoute, là, on se le fait écouter.

P : On a juste des obsessions différentes et on se fait notre best of des obsessions pour les faire écouter aux autres. On se demande : “C’est quoi ton obsession de la semaine ?” Et puis on se fait un petit zip et hop ! Un “zip obsession”.

Parlons un peu de votre nouveau live qu’on a découvert mercredi soir. Vous l’avez bien bossé, non ? Vous vous sentiez plus à l’aise que l’été dernier lors de votre Boiler Room au Grand Palais et votre live au festival Calvi On The Rocks ?

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 - Photo 2

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 – Photo 2

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 - Photo 3

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 – Photo 3

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 - Photo 4

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 – Photo 4

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 - Photo 5

Club cheval en live chez Warner le 17 février 2016 – Photo 5

P : La question ne se pose même pas ! Au Grand Palais, c’était notre premier et on n’était pas prêts. Bref, on était comme jetés dans la fosse aux lions !

ST : On a dit oui à ce live – attention je pense qu’on a bien fait ! – deux jours avant alors qu’on n’avait même pas fini de l’écrire.

Comment vous avez vécu les retours, parfois très durs ?

ST : Moi j’étais blessé mais surtout déçu de nous. On n’a pas assuré mais quelque part ce n’était pas de notre faute (il y a eu un problème technique, pour info). D’ailleurs, deux semaines plus tard, c’était vraiment génial à Calvi.

P : Et pourtant les conditions n’étaient pas idéales !

ST : 4 000 Parisiens qui attendent de te tomber dessus !

Panteros666 : Si tu ne te lances pas, tu ne fais rien dans ta carrière. On fait de la musique, on ne vend pas des assurances !

Et à aucun moment vous ne vous êtes dit avant le Grand Palais : “On va peut-être attendre…” ?

P : Si, mais à un moment si tu ne te lances pas, tu ne fais rien dans ta carrière ! On fait de la musique, on ne vend pas des assurances !

… Donc en même temps c’est formateur.

ST : Complètement ! Ça nous a tellement traumatisés qu’on sait qu’on ne va plus jamais revivre ça !

P : En fait, il y a eu un bug dans la config MIDI pour les connaisseurs. Un peu comme le WiFi qui saute, si vous voulez. J’ai senti mon âme sortir de mon corps et se coller à la verrière du Grand Palais. (rire)

ST : Moi j’ai cru que j’allais m’évanouir, vraiment ! Et Myd il était comme ça (il mime quelqu’un en boule, littéralement). On a dû redémarrer le système et ça a bien dû prendre 3 ou 4 minutes. Les plus longues minutes de ma vie…

P : On a continué en impro : Canblaster au piano et moi à la MPC…

ST : Mais c’est la vie !

En parlant matériel, justement, vous revendiquez ce statut de groupe électronique avec ce que ça implique en termes de matos. Vous n’avez pas peur pour la tournée à venir ?

ST : C’est méga relou mais c’est aussi trop cool ! Ça muscle, ça responsabilise et ça nous rapproche aussi entre nous. On partage le même fardeau, en somme.

P : C’est un peu comme un film Disney : chaque moment devient un défi que tu es heureux d’avoir affronté et réussi.

Du coup, ça veut dire que vous refuserez désormais tous les DJ sets sous l’alias Club cheval ?

En choeur : Oui, carrément !

Vous allez jouer à La Gaité Lyrique, au Printemps de Bourges, au Sónar… D’autres dates de prévues ?

En choeur : Oui et notamment au Printemps de Bourges.

ST : Un gros festoche sur 3 !

Où c’est le plus agréable de jouer ? C’est quoi votre dernier meilleur souvenir de date ?

ST : Ça dépend, on a tous des goûts différents. Moi, je suis super excité quand je joue en extérieur. Et puis j’aime bien jouer aux Etats-Unis parce que c’est le seul endroit où le public entend, comprend les paroles (ils chantent en anglais, ndlr).

P : Les Américains ne sont même pas surpris qu’on mélange des trucs techno, house, électro avec des trucs plus soul et RnB. Ils ont une vraie culture de la fusion. Et d’ailleurs, là-bas, la culture club est hybride et issue de mélanges improbables. C’est naturel pour les Américains.

ST : Après ce ne sont pas vraiment des avant-gardistes, mais ils sont open à la découverte.

Sam Tiba : Je pense que je vais bientôt sortir un album tout seul

Et vous continuez vos projets perso ? Si oui, quoi de prévu chacun de votre côté ?

ST : Un peu moins évidemment, mais toujours. Moi je pense que je vais bientôt sortir un album tout seul. Mais là je n’ai pas le temps.

P : Ouais tous, je pense.

ST : On a besoin d’un défouloir, d’une sorte de trou dans le sol dans lequel on peut crier hyper fort.

P : Ou d’un petit trou dans le plafond. (rire)

Dans la verrière… Dernière question très importante : vous vous appelez maintenant “Cc :” et non plus “Club Cheval”, on se trompe ? C’est parce que vous en pouviez plus des allusions équestres ?

P : Ah ça, les allusions équestres, c’est condamnable à vie !

ST : Oui ! Après, c’est sûr que si j’étais journaliste, je le tenterais aussi…

P : “Le quarté gagnant !” On les a toutes eues, définitivement…

ST : Défi aux journalistes : trouvez une nouvelle tournure et alors là, respect !

Et pourquoi avoir viré le “c” majuscule de Cheval ? En référence aux emails ? Faut vous appelez “Carbon copy”, maintenant, du coup ?

ST : Ah non ça c’est un peu un nom de petit groupe à la Synapson si vous voulez mon avis…

P : Moi ça me fait plutôt penser à Carbon Airways.

ST : Ah mais ouais ils sont où eux, tiens ?

P : Je ne sais pas ils sont en 3ème, maintenant ! (rire) Ça fait 5 ans qu’ils sont bloqués à l’âge de 16 ans…

Donc rien à voir avec les emails en fait ?

P : Si ! On a travaillé l’identité visuelle de l’album avec Etudes Studios parce qu’avant d’être un groupe, on était quatre identités à part entière. On avait besoin de quelque chose de minimaliste et d’uniforme pour mettre en avant la musique et non nos individualités.

D’où la tenue noire sur scène, notamment ?

ST : Oui et puis sinon ça serait n’importe quoi. Ça serait le plus grand cabaret du monde, quoi !

Le Minimix teasing de l’album Discipline :

Le premier album de Club cheval, “Discipline”, sortira le 4 mars 2016 (Warner)
Retrouvez Club cheval en live à La Gaité Lyrique le mercredi 9 mars 2016. Places disponibles ici !